Shoots de réconfort #2
Alors que les drames se succèdent, j'ai plus que jamais besoin d'ondes positives et de réconfort immédiat. D'où mon envie d'initier une rubrique "feel good" où j'évoquerai un souvenir, un livre, un film, une oeuvre, une musique ou encore un vêtement m'apportant un shoot de bonheur…
Un souvenir : une nuit sous la tente
Vermelles, juin 1988. "Tu crois qu'ils ont bien fermé à clé la porte de derrière ?".
Emmitouflée jusqu'au ras des yeux dans mon duvet à carreaux jaune et marron que j'utilise d'ordinaire comme nappe pour mes dînettes en plein air, je ne suis pas vraiment rassurée.
Assis bien droit au centre de notre petite tente héritée des années de "guides" de maman, mon frère ne répond pas. "Chut ! Écoute… je pense que le chat des voisins est encore dans le jardin".
Je n'écoute pas. J'ai trop peur d'entendre des bruits que je ne saurais identifier. Cette nuit sous la tente que nous avons planifié depuis des jours m'apparaît bien moins excitante que prévu. J'ai l'impression que notre immense jardin s'est transformé en île déserte lugubre et que mon frère - que je perçois d'ordinaire comme un héros invincible - n'est en réalité qu'un maigre garçon de 10 ans bien incapable de me défendre face aux potentiels dangers que la nuit nous réserve.
Il s'allonge à côté de moi.
"Tu veux qu'on sorte compter les étoiles ?" "Jamais de la vie ! Je ne bouge pas de la tente tant que maman ne vient pas nous réveiller !"
Il rit.
"Tu veux que je te raconte une histoire d'aventuriers ?".
- "Dis-moi plutôt comment cela se passe pour toi en ce moment à l'école".
- "Oh, je me débrouille. Je me suis encore enfermé dans les toilettes ce midi pour qu'on ne m'oblige pas à aller à la cantine".
- "Mais tu n'as pas eu trop faim ?"
- "On s'habitue à tout…"
- "Viens me voir à la récré du matin, je te donnerai mon goûter".
- "T'inquiètes petite soeur, je me débrouille. Allez, on dort".
- "Tu me donnes la main ?"
Il ne dit rien, mais j'entends le froissement crissant de son duvet, puis sa main qui cherche la mienne. En fait, je me suis trompée : c'est bel et bien un héros invincible qui dort sous cette tente avec moi ce soir.
Un vêtement : le pull en cachemire de Julien
Le cachemire… Quand j'étais enfant, ce mot m'évoquait un nuage duveteux, un luxe inaccessible. Personne chez nous n'avait un pull ou une écharpe en cachemire. Nous avions des pulls en laine qui piquaient un peu et l'on s'en accommodait très bien…
En grandissant, je notais la présence dans des contextes très différents de ce mot quasiment exotique à mes yeux, entre romans de Balzac (où le châle en cachemire était synonyme de grande richesse), discussions entre adultes ("C'est hors de prix… c'est du cachemire") et cours de mon lycée privé un peu huppé ("Ma tante m'a offert un pull en cachemire, c'est un Eric Bompard").
Et puis le temps a passé et le cachemire s'est démocratisé. Il y a quatorze ans, des amis canadiens ont ainsi offert un pull Ralph Lauren en cachemire à Julien. Quelques années plus tard, il a arrêté de le porter, un trou de mite ayant fragilisé l'encolure au dos. J'ai alors décidé de l'adopter et suis immédiatement tombée amoureuse de son toucher, de sa douceur, de sa chaleur. Au contact de ce pull, j'ai compris à quel point la qualité d'une matière pouvait influencer l'allure, l'assurance, l'élégance, la force et la confiance en soi d'une personne.
Une oeuvre d'art : les dessins d'enfant de Fabien Mérelle
Une amie très proche m'a récemment offert un ouvrage retraçant une partie de l'oeuvre de Fabien Mérelle. Elle qui connaît mon amour pour les sculptures de ce dernier souhaitait me faire découvrir ses dessins. Or, si j'avais déjà entre aperçus son trait précis aux envolées surréalistes, je n'avais jusqu'ici jamais vraiment pris le temps de m'y attarder…
J'ouvris donc le livre avec impatience et gourmandise et tombai en arrêt devant un dessin hybride aussi étrange que fascinant. Réalisé par l'artiste quand il était enfant et reprit par celui-ci des années plus tard, il en émanait une force quasi tellurique. Plusieurs minutes durant, il me fut impossible de m'extraire de la contemplation de cette oeuvre composite, tant sa symbolique me bouleversait.
Mais aussi…
Musique : Oceans de Hillsong United
Film : Le Maître d'école avec Coluche
Livre : Respirer de James Nestor
Boisson : Un citron chaud au miel
Par Lise Huret, le 03 novembre 2023
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