En 2008, la fraise va bien au-delà des connotations historiques : elle se joue des codes, se plisse, se suggère, se déplie, se veut bijou ou conceptuelle. John Galliano s'est amusé à en parer certaines de ses blouses ou paletots surdimensionnés. En volutes de crêpe ou en broderie anglaise, entre poésie et balade au 19e siècle, la fraise sous ses doigts devient féminine, voire girly.
Faussement traditionnelle, portée avec une paire de badges rosés sur un voile de soie fleurie, la fraise proposée par notre corsaire britannique préféré semble nous suggérer que pour l'été 2008, il n'y aura rien de mieux que de jouer l'xxl élégamment racé, que l'on fera contraster avec un bas affriolant gentiment translucide et finement suggestif. Loin d'enfoncer le cou, la fraise version Galliano dessine une jolie corolle autour d'un visage gracile, variation qui a des chances de séduire les jeunes femmes férues de détails à la fois couture, délicats et emprunts de nostalgie, tout en étant néanmoins furieusement dans l'air du temps.
Si les grands du prêt à porter ont aimé détourner cet attribut surgi du passé, il a également inspiré les jeunes designers en phase de devenir des valeurs sûres du marché. Ainsi, le jeune hollandais Mattijs Van Bergen (2e photo) a fait de sa présentation de fin d'année à la Saint Martins School un instant enlevé et riche en émotion mode, tant son traitement décomplexé de la fraise fut pile dans la mouvance du moment. Pastelles, décomposées, justement inspirées, conceptuelles mais accessibles, ses créations nous emportent dans un espace-temps indéfini, où la fragilité jouxte la rigueur victorienne et où l'esthétique prend le pas sur toutes autres considérations.
Par ailleurs, si John Galliano la pense majestueuse, chez Bottega Veneta elle est juste suggérée par d'astucieux plissés, le tout permettant à la fashionista de choisir entre détails ludiques assumés et minimalisme chic. Katherine Wardropper (3e photo) quant à elle, plus plasticienne que styliste, participe à l'élaboration de cette tendance en faisant de sa collection de bijoux une succession de micros sculptures Tim Burtoniennes, à la fois féeriques et glaçantes.
Des quelques interprétations de la fraise citées ci-dessus, aucune ne se ressemblent mais toutes se font écho, de par leur source d'inspiration similaire. C'est pourquoi on peut noter sans craindre de se tromper que la fraise - quel que soit sa forme ou son degré de ressemblance avec le modèle original - est un détail que l'on risque de rencontrer souvent dans les prochains mois.
A propos de la fraise, chez Alexandre Herchcovitch aussi, il y a quelques touches évocatrices. Pour ce qui est de la collection Galliano, elle est très belle. Beaucoup de choses pour le soir, très vaporeuses et froufroutantes.
En revanche, je me permets de te signaler ce qui me semble être une confusion à propos de la photo du milieu : elle n'est pas extraite du défilé de Bottega Veneta.