Sans tomber dans des travers à la Gaultier (qui utilise parfois des mannequins hors norme comme bêtes de foire), le styliste Yohji Yamamoto a su célébrer avec grâce et tempérance un homme viril à l'opposé des éphèbes auxquels nous nous étions habitués. De plus, lorsque la différence s'affiche ainsi avec élégance, sans matraquage médiatique ni effets de manche démagogiques, on ne peut qu'être charmé.
Le défilé Yamamoto s'est donc ouvert sur un fringant sexagénaire poivre et sel au charme ravageur, nous réconciliant sur le champ avec une mode homme souvent difficile à imaginer sur les mâles de notre entourage. Est-ce l'aura bonhomme de ces gentlemen à la ride sexy qui nous fit adorer un vestiaire 100% Yamamoto, ou plutôt l'alchimie des deux, qui permit à la collection du styliste japonais de gagner en évidence ? On penchera pour la deuxième possibilité.
En effet, autant les looks des néo papys révèlent avec brio leur élégance nonchalante, autant les jeunes mannequins ont parfois du mal à incarner leurs vêtements. Ces derniers font ainsi pâle figure aux côtés d'hommes aux visages burinés par le temps, que les costumes de Yamamoto subliment comme rarement il fut fait.
La collection semble avoir deux facettes : l'une typique du créateur, où asymétrie, jeux de matières et distorsions des volumes cannibalisent l'allure, et une autre où concept et portabilité s'associent sur un homme de chair et de sang, propice à faire vivre un style. Certes, Yohji n'est pas le premier à faire défiler des modèles ayant largement dépassé la cinquantaine, Ann Demeulemeester ou Vivienne Westwood s'y sont déjà risquées. Cependant, il est sûrement le premier chez qui les mannequins du troisième âge volent véritablement la vedette aux jeunes adolescents imberbes…
Par Lise Huret, le 30 juin 2008
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