Défilés automne/hiver 2009-2010 à New York

À New York, chacun semble s'être recentré sur l'ADN de sa griffe. Les créateurs ont ainsi décidé se focaliser sur ce qu'ils savent faire de mieux, plutôt que de s'aventurer sur les pentes glissantes de la prise de risque stylistique. Dès lors, les défilés signatures furent prépondérants, bien qu'entrecoupés de quelques shows oscillants - en terme d'inspiration - entre le passé et le futur, comme si le présent était devenu un sujet tabou...
Dans ce contexte, le lancement de nouvelles tendances ne semble pas à l'ordre du jour, chacun tentant d'attirer la clientèle soit à coups de valeurs sûres, soit - et ils sont nettement plus rares - en proposant des shows extrêmement forts, visant à marquer les esprits plus que les garde-robes. Cela dit, le curieux processus lié à l'air du temps et visant à infuser communément les esprits créatifs a tout de même fonctionné, de telle sorte que si les mouvances sont plus disparates et moins marquées que par le passé, elles sont malgré tout bel et bien présentes…


Découpes
Défilés 2010 - New York
En collants opaques, souvent gantées et affichant une mine un rien sévère, les élégantes de l'hiver prochain ont renoncé aux mini jupes aguichantes pour renouer avec l'art de dévoiler une parcelle de peau inattendue. L'objectif est de réécrire les codes de la séduction avec retenue, tout en ayant l'air de ne pas y toucher.
Chez Alexander Wang, le total look noir 100% urbain et clairement nineties joue la carte de la découpe graphique, afin d'alléger un ensemble compact, presque guerrier. Entre influences rock et design à la Thierry Mugler, Wang apporte à sa robe bustier une touche personnelle en lui apposant une découpe en T, lui conférant ainsi une légère dose de sexyness indispensable pour déjouer l'austérité moderne de ladite silhouette.
Jonathan Saunders s'inspire quant à lui des bustiers d'antan, dont le corsage était mis en valeur par de multiples colifichets. Décorant le décolleté ou gainant le cou, ces derniers dévoilaient toujours largement la poitrine. Saunders choisit de minimaliser le propos en balayant le superflu, afin de conserver l'essentiel : une découpe classique, mais délaissée.
En moulant de près son modèle dans une robe ultra couvrante, Narciso Rodriguez confère une sensualité exacerbée à chaque millimètre de peau dévoilée.
Ces découpes permettent de redécouvrir un corps féminin qui ne cesse de s'effeuiller au fil des saisons. Ici dévoilé pudiquement et de façon stratégique, il gagne en mystère et en aura moderne.


Du noir au néon
Défilés 2010 - New York
Entre ces deux tendances, le coeur des créateurs balance, au point que certains ont choisi de commencer leur show par une succession de total looks réglisses, pour finir par des pièces ultra bright. Autrement dit, peu arrivent à faire un choix entre l'austérité chic de rigueur et une palette vitaminée porteuse d'optimisme. Du coup, les extrêmes cohabitent...
Chez Max Azria, l'intemporelle petite robe noire se décline en version épaulée un rien gothique. Entre collet monté, manches longuissimes et fuseaux assortis, la belle ne laisse rien apparaître de sa peau, préférant miser sur l'élégance romantico-moderne de son vêtement, quitte à apparaître légèrement austère.
Casual et stylées, les Upper East Side girls de DKNY ne connaissaient pas la crise, le noir leur permettant d'affûter leur allure. Le caban se transforme ainsi en veste d'officier au col oversize, tandis que le slim brut se mue en pantalon flou légèrement carrot, le tout étant relevé par une paire de bottines richelieu bicolore faussement classique. Les fans de Gossip Girl savent désormais comment attaquer l'hiver prochain…
De son côté, Chris Benz ne renonce en rien à son addiction aux teintes survitaminées. Son pays ploie sous les répercussions de la crise des subprimes ? Le créateur décide alors de lui appliquer un plan de relance bien à lui, constitué de vert émeraude, de bleu irisé et de jaune poussin... On flashe tout particulièrement sur sa demoiselle smart en camaïeu bouton-d'or. La fantaisie chic émanant de chaque détail a de quoi faire économiser de nombreuses heures de luminothérapie à toutes les fashionistas…
Enfin, le défilé Marc Jacobs relève plus de l'antidote anti-morosité que du vestiaire commercial, et c'est tant mieux. Tout apparaît surdosé, surdimensionné, surlooké, mais qu'importe : il n'en faut pas moins pour parvenir, ces temps-ci, à voir la vie en rose.
Entre total look noir et couleurs fluo, il est donc hors de question de choisir. A l'image des podiums new-yorkais, il suffira d'alterner selon son humeur.


Elle porte le monde sur ses épaules...
Défilés 2010 - New York
Si sur les podiums les effluves 80/90's ont tendance à s'estomper, un des points forts de l'époque reste plus que jamais d'actualité : le look de Stéphanie de Monaco dans "Ouragan". En effet, les carrures prononcées sont légion et semblent vouloir s'imposer en tant que nouvelle norme esthétique.
Si Zac Posen est celui qui force le plus le trait, les faveurs du créateur en matière de volumes vont plus vers les costumes du 19e siècle que vers ceux de la dernière décennie. Il est vrai que ses manches gigots surdimensionnées rappellent bien plus une toilette signée Charles Frederick Worth qu'un costume de scène de Madonna...
Luxueux et désirable, le manteau aux manches en fourrure d'Alexander Wang a le bon goût de jouer sur le volume naturel de la matière pour coller à la tendance "carrure". Ainsi agencé, l'effet épaulette acquiert une vraie portabilité, à l'abri de l'excentricité et de l'exercice de style.
On retrouve également les manches gigots chez Marc Jacobs. Cousues dans un coton molleton, celles-ci se veulent 100% eighties. Certes, le dress code qui leur est associé frise le surdosage, cependant, utilisé sur un look plus casual, ce type de pièce peut réveiller n'importe quel denim ou jupe crayon.
C'est désormais une évidence : les carrures oversize sont définitivement entrées dans le lexique mode du moment.


Protection urbaine
Défilés 2010 - New York
Qu'on le veuille ou non, la crise mondiale a sensibilisé l'univers de la mode à la précarité de la stabilité et de la sécurité. On a ainsi vu fleurir sur les podiums des atours se pensant comme des armures, et ayant pour vocation de protéger la femme du 21e siècle des agressions multiples (environnementales, économiques et sociales) auxquelles elle sera assurément confrontée.
La muse d'Hervé Léger se perçoit comme une guerrière urbaine qui, tout en arborant une toilette évoquant les cottes de mailles des samouraïs, ne renonce en rien à sa féminité. À la fois sexy et farouche, la belle assume le danger tout en privilégiant son arme secrète : la séduction.
Chez Rodarte, c'est sanglée et bottée de cuir que la citadine affrontera le bitume. Les soeurs Mulleavy lui apportent néanmoins un peu de réconfort en la réchauffant de grosse maille cosy. Dès lors, cette tenue semblant s'être échappée d'un Matrix parvient sinon à séduire, tout du au moins à gagner en douceur.
Narciso Rodriguez désire t-il envoyer un bataillon de modeuses en Irak ? C'est en tout cas l'impression donnée par les ensembles camouflages ayant défilé lors de sa présentation new-yorkaise. Oui mais voilà : à moins un d'un cas de force majeure, il y a fort à parier que ces tenues ne sortiront jamais de notre abri anti-atomique...
Une chose est néanmoins certaine : la mode aide à se sentir plus forte. Dès lors, que ce soit en robe de cocktail version "Le dernier des Samouraïs", en bikeuse SM ou en poncho army, tout est bon pour prendre le pouvoir sur la sinistrose diffusée 24h/24 sur TF1.


Or en stock
Défilés 2010 - New York
Éternelle valeur refuge, l'or est la seule capable de rassurer les épargnants. Dès lors, si les fashionistas n'ont pas les moyens d'acquérir quelques napoléons, elles peuvent toujours pallier ce manque de sécurité par l'acquisition de vêtements et d'accessoires étincelants, qui voient leur cote monter en flèche.
Derek Lam a le chic pour composer des ensembles percutants avec le minimum d'effets. En choisissant une étoffe dorée pour draper une simple jupe, il parvient ainsi à transformer le classique duo top blanc/jupe longueur genou en un "it" look incisif et évident.
Après avoir été de cuir, le tregging se décline en maille synthétique 18 carats sous les doigts de Max Azria (BCBG). Celui-ci se porte uniquement avec du noir, afin de patiner sa tendance naturelle au bling bling. On peut donc sans hésiter copier la silhouette de Max Azria, qui confère à la petite robe noire un twist de modernité décalé et très à propos.
Chez Proenza Schouler, l'or se retrouve sur les escarpins, mais aussi en satin très light sur les combinaison sporty à la Miu Miu. Rendues casual par une paire de collants en laine, ces teintes n'hésitent pas à sortir de jour.
La couleur or perdant à New York toute connotation disco ou R'n'B (au profit d'un registre chic), il sera de bon ton de ne pas laisser ce genre de pièces dormir à la banque. On les portera alors soit avec du noir, soit avec du blanc, et on misera sur des volumes élégants et minimalistes.


Abondance de fourrures
Défilés 2010 - New York
PETA n'a pas fini de prendre Anna Wintour et Carine Roitfeld en grippe. En effet, à en juger par la présence pléthorique de la fourrure lors des défilés new-yorkais, il serait étonnant que les grands magazines ne s'en fassent pas l'écho...
Blanche et opulente, la fourrure de chez Derek Lam se veut glamour façon Sharon Stone. Elle se porte assez sobrement, tout accessoire devenant superflu face l'aura warmy et sensuelle qui s'en dégage.
Les pelages colorés de Matthew Williamson se veulent fortement punk bohème. Il offre ainsi à celles qui le veulent - et le peuvent - de quoi se lover dans un cocon aux effluves tribales déjantées, dans la plus pure tradition Williamson. Là aussi, la fourrure se suffit à elle-même : un simple ceinturage l'habille....
Chez Preen, c'est le duo rose crissant et peau de bête venue des plaines de Mongolie qui crée l'envie. En effet, lier la sophistication d'un pantalon presque disco à une fourrure à l'allure légèrement rustique permet de sublimer un look dont les éléments pris séparément se seraient pas forcément inoubliables. On retient que miser sur l'alliance des matières et des teintes peut parfois transformer une tenue.
L'hiver prochain, la fourrure restera donc une valeur sûre. Cependant, loin de se cantonner aux pièces magistrales, elle squatte également cols et poignets, réchauffant ainsi de plus en plus de modeuses…


Shaker d'imprimés
Défilés 2010 - New York
Annoncée lors des défilés printemps/été puis reprise par la rue, la tendance visant à absoudre les mariages d'imprimés les plus insolites vient d'être confirmée par New York. Après des années de conflits, les rayures et les carreaux se sont donc réconciliés, tandis que tous s'extasient devant le rapprochement entre le pied de poule et l'imprimé fleuri…
En dépit d'arborer des froufrous à carreaux, l'écolière seventies de chez Marc By Marc Jacobs dynamite son allure de petite fille sage en enfilant une paire de collants rayés. Le tout étant réalisé dans des teintes sourdes ou automnales, on évite la dérive clownesque. On misera sur des accessoires pointus pour achever de fashioniser l'ensemble.
Alexandre Hercovitch quant à lui mise à la fois sur les matières clinquantes et sur les imprimés. Malheureusement, il ne suffit pas de séparer ces derniers avec une sobre jupe noire pour adoucir l'effet scintillant légèrement "déguisement" qui se dégage de l'ensemble...
Par contre, chez DKNY, Donna Karan manie parfaitement la tendance. Elle mise astucieusement sur la même teinte afin de limiter les accros visuels et peut dès lors mélanger rayures et pieds de poule sans prendre de risques, les souliers léopard parachevant l'excellence fashion de la tenue.
Au final, on retient que si l'on veut mixer tous azimuts, on évite les matières disco, on favorise les harmonies de couleur et on n'hésite pas relever l'ensemble par le biais d'un accessoire imprimé.


À noter également :

Les longs gants reviennent sur le terrain et réchauffent les manches courtes (Phi, Derek Lam, Philosophy)
À en croire New York, l'hiver prochain se passera en cuissardes (Rodarte, Lacoste, Alexandre Herchcovitch)
Le satin s'impose comme une matière indispensable
Les robes se pensent le plus souvent en corsage asymétrique (Rodarte, Abaete, Lela Rose)
Les écharpes tubes récidivent et se portent soit en laine, soit en fourrure (DKNY, Williamson, Michael Kors)
Le jaune aime à se porter en touches
Les chapeaux brillent par leur inventivité (Erin Fetherston, Anna Sui, Narciso Rodriguez)

©photo : Vogue
Par Lise Huret, le 23 février 2009
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10 commentaires
Tous les commentaires
LéaIl y a 15 ans
Whaouu, génial cet article ! J'adore ta description des tendances de new york, même si malheureusement les looks ne me séduisent pas particulièrement...
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vanessaIl y a 15 ans
j'aime bien les tenues de marc jacobs et dkny coco est-ce que tu vas faire un article sur les tenues des stars lors des Oscars 2009 comme tu avais fait pour les golden globes 2009?
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Coco (TDM)Il y a 15 ans
vanessa : je ne sais pas, car rien ne m'a vraiment marqué cette année :/
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vanessaIl y a 15 ans
je suis du même avis que toi coco j'ai préféré te poser la question au cas où une tenue m'avais échappé www.dailymail.co.uk/tvsho... mais hélas rien de marquant cette année aux oscars alors que pour les golden globes 2009 j'avais craqué pour les tenues de drew barrymore et kate winslet qui portait une robe ysl comme aux oscars d'aiileurs même si j'avoue préférer celle des golden globes
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sebIl y a 15 ans
mouais ,rien de bien innovant la dedans ,a part le show marc jacobs et le dereck lam ,je suis plutot décu par les défilés new yorkais de cette saison ,on dit toujours que les tendances viennnent chez nous directement par le biais de l'amérique cette saison ,non merci ,o,n s'en passera bien !c'ets vraiment trop simple a mon gout ,il n'y a aucun accessoire ,je préfére les show Londonniens !
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YuyieIl y a 15 ans
Merci pour cette analyse si juste et éclairée.

Il est vrai que les coupes sont plutôt classiques, les couleurs consensuelles, et que pour les surprises il faudra repasser la saison prochaine, cependant je trouve cela agréable à voir, même s'il est vrai qu'il y a encore et toujours un air de déjà vu.
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AndreaIl y a 15 ans
Super analyse comme d'habitude, merci Coco !
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....Il y a 15 ans
J'ai l'impression ses dernières années que la fashion week new-yorkaise se cherche entre la surprenante Parisienne, la glamourisime italienne et l'exuberante Anglaise!
Résultat: Un peu de Balenciaga chez tel, de Bottega Veneta chez l'autre (derek lam) puis de Balmain bref....
Néanmoins, j'ai aimée pas mal de shows et c'est parfois les plus commerciaux (DKNY, MARC BY MARC...) qui refletent le plus mon idée de la new-yorkaise!!!
PS: notons le grand retour des cuissardes, yen a partout!!!
ET je ne risque pas de porter du ZAC POSEN d'ici peu!!!
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lollipops25Il y a 15 ans
J'aime bien la tenue de Chris Benz en jaune, je trouve cela très vitaminé, très coloré !
Je crois que je vais m'essayer à cette couleur ...
Malheureusement, je suis blonde .... Croyez vous que le jaune m'ira ???
Pas sûr ...
Enfin, !
Et puis merci encore Coco pour tes articles géniaux !!
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dreeyIl y a 15 ans
So sex la nana à l'abat jour =D mdr
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