Lorsque Sophia Kokosalaki permit à la maison Madeleine Vionnet de figurer au calendrier de la fashion week, tous saluèrent l'initiative, tant la filiation spirituelle entre les deux créatrices était saisissante. Oui mais voilà : alors que le résultat fut jugé prometteur, la jeune styliste grecque fut remplacée au bout d'une année par Marc Audibet, pour moult raisons plus ou moins obscures…
Connu pour être friand d'innovation textile, ce dernier avait su séduire les dirigeants de Madeleine Vionnet, qui voulaient alors projeter la maison dans la modernité et ainsi faire décoller les ventes. Cependant, au bout de quelques mois, Audibet déclare forfait en invoquant une mauvaise gestion financière de la société, qui - selon lui - place la griffe en potentielle faillite perpétuelle. Depuis, Madeleine Vionnet semblait définitivement appartenir au passé…
C'était pourtant sans compter sur Matteo Marzotto, businessman italien et accessoirement ex de Naomi Campbell, souvent pris sous les flashs du Sartorialist. Celui-ci vient en effet de racheter la maison de couture avec Gianni Castiglioni (le mari de la créatrice de Marni). Il déclare à ce sujet : "J'aimais l'idée d'une marque avec une histoire, mais pas une histoire trop récente". Il désire redonner vie à cette vieille dame endormie et croit dur comme fer à son potentiel bankable.
Pour ce faire, il a débauché chez Prada le styliste Rodolofo Paglialunga, qui a pour mission de proposer une collection dès le mois de juin, et d'en concevoir une autre digne de défiler lors de la semaine de la mode parisienne en octobre. Espérons que cette fois-ci sera la bonne et que la maison renouera avec sa gloire d'antan, lorsque des stars telles que Marlène Dietrich ou Greta Garbo se pressaient chez Madame Vionnet afin de voir leur silhouette sublimée par ses fameux drapés...
Edit du 28/02 : Nous avons reçu un email d'Arnaud de Lummen (ancien directeur général de la maison Vionnet), qui tenait à rectifier certaines erreurs et inexactitudes. Retrouvez ci-dessous ses explications : 1. La société Vionnet n'avait en aucun cas tiré le rideau mais connaît une progression constante de son chiffre d'affaires depuis 2007, celui-ci s'établissant à 2,5 millions en 2008 tandis que notre société est à l'équilibre. C'est une des raisons de l'intérêt de M. Marzotto pour notre Maison. 2. Sophia Kokosalaki n'a pas été remplacée pour d'obscures raisons mais parce qu'à la suite de son rachat par le Groupe Diesel, sa pleine implication dans la renaissance de Vionnet n'était plus possible. Certains grands groupes avec de larges équipes se satisfont d'un designer qui vient quelques heures par semaine valider les croquis des assistants, ce n'était pas notre cas ni notre conception d'une collaboration. 3. Marc Audibet (conseil artistique) n'a pas déclaré forfait en raison d'une mauvaise gestion financière de notre société mais parce que, selon lui, nous n'assurions pas "les conditions matérielles et financières indispensables" indispensables à la réalisation des collections. En d'autres termes, il voulait beaucoup plus de moyens. Interrogé par l'AFP, j'ai alors répondu à l'AFP que les exigences de M. Audibet étaient de nature à nous mettre en dépôt de bilan. Mal relayée par l'AFP et divers blogs, mon commentaire s'est transformé en l'information selon laquelle nous étions en quasi-dépôt de bilan. L'AFP a apporté un démenti depuis, d'ailleurs renouvelé cette semaine. 4. Pour ne pas ajouter de la confusion, nous n'avons pas communiqué sur la direction artistique de nos deux dernières collections, mais ces collections ont connu un succès commercial et ont été salués par les journalistes qui se sont déplacés pour voir nos créations. Le départ d'un créateur, sauf lorsque ce dernier est le fondateur, n'a jamais signifié la fin d'une Maison. Qui plus est, le patrimoine Vionnet est suffisamment ouvert et inépuisable pour donner lieu à une multiplicité d'interprétations réussies. 5. Matteo Marzotto est désormais le seul actionnaire de la Maison, tandis que Gianni Castiglioni est un partenaire industriel du projet.
Par Lise Huret, le 27 février 2009
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