Au vu du soin qu'elles mettent aujourd'hui à s'éviter, on se demande comment deux femmes ayant si peu en commun ont pu cohabiter aussi longtemps à la tête du Vogue Paris (voire si cette collaboration presque contre-nature n'aurait pas contribué à la stagnation du magazine). Il est vrai que ces derniers mois virent Emmanuelle Alt assumer une personnalité aux antipodes de celle de son ex-mentor Carine Roitfeld...
Aux fourrures opulentes, jupes crayon Givenchy et dress-code ultra pointu de la styliste des dernières campagnes Chanel, la jeune femme préfère en effet un uniforme passe-partout - entre jeans slims, basics Isabel Marant et vestes Balmain - qu'elle réchauffe sans rougir d'une banale doudoune issue du vestiaire de sa créatrice fétiche. Des tenues qui n'excitent guère les Tommy Ton et consorts, mais qui lui permettent de faire la différence au sein de cette faune ultra sophistiquée en quête perpétuelle de parutions streetstyle.
Une tendance à la modestie que l'on retrouve sans surprise au coeur de la nouvelle ligne éditoriale du Vogue Paris : alors que les "scandales" battaient autrefois la mesure, les pages du magazine n'ont désormais plus vocation à choquer. Au risque de se faire ennuyeuses...
Cela dit, si le magazine tarde à trouver une alternative bankable à l'esthétique porno chic plébiscitée par Carine Roitfeld, Emmanuelle Alt n'en est pas moins parvenue à offrir au titre une dimension 2.0 digne de ce nom. Dimension que sa prédécesseure ne semblait guère pressée de lui donner...
On note au passage que le lancement récent de la nouvelle version du Vogue.fr fut l'occasion pour elle d'afficher une fois de plus sa différence par le biais d'un clip aussi surprenant que déjanté. En se déchainant sur le tube "Wake Me Up Before You Go-Go" de Wham en compagnie de Mademoiselle Agnès et d'une poignée de mannequins, la discrète Emmanuelle fit en effet preuve d'un second degré la rendant bien plus accessible que l'auteur de "Irreverent".
Plus en phase avec les nouveaux médias, moins "show-off" que l'ancienne collaboratrice de Tom Ford mais également moins galvanisante, Alt désacralise peu à peu un poste longtemps cannibalisé par l'aura fascinante de Carine Roitfeld. Reste à savoir si elle parviendra à insuffler au Vogue Paris cette désinvolture rafraîchissante dont elle a le secret et à y mettre en pratique ses récents propos : "il ne faut pas prendre la mode trop au sérieux"...
Par Lise Huret, le 24 février 2012
Suivez-nous sur , et