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Obsession de l'image : du selfie à la chirurgie
"Miroir, miroir en bois d'ébène, dis-moi, dis-moi que je suis la plus belle" s'enquiert anxieusement la méchante reine dans le conte Blanche-Neige. Et le miroir de répondre : "En cherchant à la ronde, dans tout le vaste monde, on ne trouve pas plus belle que toi". Aujourd'hui, si le miroir s'est mué en téléphone portable rendant son verdict sous forme de "likes" et la reine en une génération entière de jeunes gens ultra connectés, le principe consistant à accorder à son image une importance prépondérante et chercher sans cesse à être rassuré quant à sa propre "viabilité esthétique" reste plus que jamais d'actualité...
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Et si les conséquences de ce phénomène sur le quotidien des adolescentes européennes restent encore relativement limitées, on ne peut pas en dire autant des jeunes Coréennes, qui vivent dans un pays où 50% des moins de 20 ans ont déjà eu recours à la chirurgie esthétique, où le visage en forme de coeur est devenu un must en matière de beauté, où une émission propose des opérations de chirurgie esthétique gratuites, où 70% des chefs d'entreprise reconnaissent que le physique est un critère très important dans le processus de recrutement et où le fait de "pouvoir réaliser un selfie sans Photoshop" arrive dans le top 5 des raisons pour lesquelles on se fait débrider les yeux, affiner le menton ou refaire la mâchoire…
Dès lors, au vu de l'obsession des générations Y et Z pour leur image, on est en droit de se demander si le phénomène coréen est destiné à rester un épiphénomène localisé ou s'il préfigure au contraire notre avenir. À première vue, c'est la première option qui semble la plus probable : la Française étant éprise de naturel et notre culture ne nous poussant pas au perfectionnisme effréné, difficile d'imaginer qu'un jour nos filles iront chez le chirurgien esthétique comme d'autres vont chez la manucure.
Oui mais voilà, si l'on suit cette logique, l'influence culturelle de la pensée confucéenne - qui prône "la nécessité de préserver son corps de toute modification" - aurait normalement dû préserver la société coréenne de cette folie. Or il n'en est rien… Il est donc certainement illusoire de croire que notre culture pourra à elle seule endiguer ce processus narcissique consistant à s'offrir via la chirurgie ce que dame nature nous a si longtemps refusé.
Apparemment inéluctable, ce phénomène soulève de nombreuses questions :
Par Lise Huret, le 27 septembre 2016
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