La grandeur de l'art miniature
En jouant avec les échelles et en poussant la minutie jusqu'à l'extrême, les artistes du minuscule nous invitent à être attentifs, à scruter les détails, à nous laisser subjuguer par les illusions et à laisser voguer notre imagination…
Isaac Cordal, le street art lilliputien
Avec ses micro sculptures - modelées dans l'argile puis coulées dans le béton - qu'il dépose au creux d'une fissure murale, au pied d'une façade décatie ou au sommet d'un Abribus, l'espagnol Isaac Cordal crée des saynètes insolites visant à provoquer chez le passant attentif un questionnement existentiel. Que ce soit via ses figurines de businessmen broyés par la férocité de Wall Street qu'il dissémine au coeur de Manhattan (voir ici, ici et là), celles plus anonymes placées de manière à mettre en abîme l'absurdité de nos vies (voir ici, ici, ici et là) ou ses personnages en costumes 3 pièces attendant la montée des eaux en s'accrochant à leur bouée (voir ici, ici et là), Isaac Cordal manie l'humour noir, la poésie du désespoir et le nomadisme urbain avec une dextérité déconcertante, offrant ainsi à ses convictions politiques une expression bien plus percutante que n'importe quel discours militant.
Joshua Smith, le Tom Pouce de l'hyperréalisme
Fasciné depuis son plus jeune âge par le concept de la miniaturisation, Joshua Smith a fait de sa passion d'enfant son champ d'expérimentation artistique. Amoureux inconditionnel des quartiers désenchantés des grandes villes, cet Australien aux allures de skateur passe ainsi son temps à reproduire à échelle réduite ces espaces urbains envahis par les tags, grignotés par le temps et rongés par la rouille (voir ici)... À la vue de ces maquettes ayant nécessité des centaines d'heures de travail, difficile de ne pas être pris de vertige, tant la minutie des détails (voir ici et là), la précision des effets matières (voir ici et là) et la ressemblance affolante avec la réalité (voir ici) dépassent l'entendement. Qu'il choisisse d'immortaliser un immeuble voué à la destruction ou simplement un élément urbain lui évoquant un passé proche et rassurant, Smith parvient à ériger la confection de maquette au rang d'art.
Daniel Agdag, les espiègleries d'un surdoué
À la vue des machines volantes et autres structures en carton de Daniel Agdag, on se mettrait presque à croire en la réincarnation, tant ces engins à la délicatesse arachnéenne et aux mécanismes complexes (voir ici, ici, ici et là) semblent être l'oeuvre d'un Léonard de Vinci ou d'un Jules Verne. Il est vrai que ce qu'il nomme humblement "sketching with cardboard" mêle le perfectionnisme joyeux du Toscan à l'imagination scientifique débridée de l'auteur de "Voyage au centre de la Terre ". Ajoutez à cela une capacité hors du commun à créer en 3D ex nihilo (Daniel Agdag ne fait qu'aucun croquis préliminaire, il élabore ses vaisseaux aériens au fil de son inspiration) et vous obtiendrez un démiurge aux créations tim burtoniennes dont la délicatesse brute transporte immédiatement l'esprit au sein d'univers régenté par un savant délicieusement fou.
Par Lise Huret, le 05 février 2019
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