Katie Sturino, icône du body positive
Figure incontournable de la mouvance "body positive", entrepreneuse à succès et influenceuse intrépide, Katie Sturino est parvenue à charmer bien au delà la communauté plus size. Portrait de cette New-Yorkaise fan des King Charles et de Dolce&Gabbana...
Ses débuts
Avant de devenir l'une des figures de proue de la mouvance "body positive", Katie Sturino est passée par l'univers de la mode, où son 44 l'a complexé plus que de raison. Tout d'abord stagiaire chez Chanel en charge de l'approvisionnement en Coca Light du frigo de Karl Lagerfeld, puis "Project Manager" chez Bobbi Brown, elle devient rapidement experte dans l'art de servir, de comprendre et de mettre en valeur les gens et les marques. Des recettes qu'elle appliquera pendant 10 ans aux clients de sa petite agence de relation de presse, mais aussi à son propre chien...
Son chien
Trois ans après avoir adopté Toast - un King Charles dont l'absence de dents lui fait tirer la langue - et avoir été témoin de l'effet positif que sa chienne provoque sur les gens qu'elle croise, Katie Sturino décide de lui faire bénéficier de ses talents d'agent publicitaire. Elle lui crée ainsi un compte Instagram où elle documente son style avec humour (voir ici, ici et là). Une initiative qui ne manque pas d'interpeller la facétieuse Leandra Medine qui se lance alors joyeusement dans un "Who wore it best ?" avec l'aspirante influenceuse. La machine est lancée : Toast pose pour Karen Walker, devient le chouchou des stars (voir ici, ici, ici et là), célèbre son mariage au sein de l'émission de téléréalité "The Real Housewives of New York", lève des fonds pour la cause des animaux abandonnés et écrit un livre. Mais aussi et surtout offre à sa maîtresse l'opportunité de passer de l'ombre à la lumière.
Le tournant de sa carrière
Sur le shooting d'une vidéo mettant en scène Toast et Léandra Medine, Katie Sturino se voit proposer par Amelia Diamond (directrice de création chez Man Repeller) de poser pour une série mode au sein des pages du site. Nous sommes alors en 2015, la représentation des femmes "plus size" au sein de la mode est quasi inexistante et Katie est au plus bas (entre divorce et importante prise de poids). Les retours infiniment positifs après la publication des photos ainsi que les messages reconnaissants de femmes appréciant de se voir enfin représentées sur un site tel que Man Repeller lui permettent de reprendre confiance en elle. Et comme souvent avec cette entrepreneuse dans l'âme, cette prise de conscience s'accompagne d'un nouveau projet…
Son blog
En 2016, elle lance "The 12ish Style", une plateforme visant à aider à se vêtir les femmes faisant plus d'un 44. Elle leur fournit tout d'abord des conseils pratiques tels que "Où dénicher des escarpins en 46 ?" et "Comment porter un vêtement trouvé au rayon homme ?", puis lance deux hashtags qui vont lui permettre d'impacter fortement l'univers "plus size" :
#SuperSize The Look consiste à décliner en mode "XL" des looks de mannequins/célébrités, l'objectif étant de prouver que l'allure n'est pas une question d'IMC (voir ici, ici et là).
#MakeMySize accompagne quant à lui des clichés pris la plupart du temps dans les cabines d'essayage et prouvant que telle ou telle marque ne propose pas de vêtements pour les femmes dépassant un 42 (voir ici, ici et là).
Répondant à une demande immense et jusqu'alors insatisfaite, le blog rencontre un franc succès qui encourage sa propriétaire à aller plus loin…
Sa marque
Surprise par le manque de produits cosmétiques répondant spécifiquement aux problèmes rencontrés par les personnes rondes, Katie Sturino décide d'y remédier en lançant la marque Megababe. Elle imagine tout d'abord un stick permettant d'éviter les irritations engendrées par le frottement des cuisses : le "Thigh Rescue". Et si les investisseurs sont au départ plus que réticents à l'idée de financer un produit qu'ils jugent peu glamour, Katie Sturino finit par les convaincre de l'inéluctabilité de son succès. Le futur lui donnera raison : la rupture de stock est quasi immédiate. S'en suivent alors d'autres créations inédites qui deviennent tous des best-sellers, du "Bust Dust" (évitant aux seins de transpirer) au "Happy Pits Underarm Mask", en passant par la version mini du "Thigh Rescue". Un an après le lancement de Mega Babe, la marque est distribuée chez Ulta, un concurrent de Sephora.
Sa communication sur Instagram
Katie Sturino a très vite compris qu'elle ne serait heureuse sur les réseaux sociaux qu'en étant elle-même à 100%. Et une fois de plus, elle a vu juste : ses posts décomplexés la montrant en maillot de bain, ses Stories évoquant la congélation de ses ovules, ses essayages infructueux (voir ici, ici et là) et ses looks réussis fédèrent aujourd'hui une audience avide d'inspiration en prise avec sa réalité.
Et si à ses débuts les marques furent effrayées par son authenticité crue, elles sont désormais nombreuses à voir en cette égérie du "body conscious" une ambassadrice potentielle.
Son corps
Lorsque Katie Sturino évoque son corps, la première chose qu'elle tient à préciser est combien elle est désormais douce et bienveillante à son égard. Car ce ne fut pas toujours le cas. Durant ses 10 années passées dans la mode, Katie Sturino a en effet tout tenté pour atteindre un 38, pour ressembler à ses collègues, pour être une femme mince. En vain. Son 44 la désespérait et son cerveau la torturait : "Tu es trop grosse, tu es tellement grosse"…
Ce n'est que bien plus tard qu'elle comprit que son corps n'était peut-être pas fait pour faire un 36/38 et qu'il fallait l'accepter et arrêter de le punir pour cela. Elle réalisa également que ses amies les plus minces étaient loin d'être épargnées par les divorces, les dépressions, les licenciements, les déceptions et les échecs et qu'il était absurde de croire que la minceur était l'alpha et oméga du bonheur.
Ses critiques envers l'industrie de la mode
Elle regrette que certaines marques ne vendent pas en magasin des tailles pourtant disponibles en ligne, comme s'il était honteux d'avoir du 46 dans ses rayons.
Elle enrage lorsqu'elle voit Melissa McCarthy vêtue d'un trench informe en couverture du magazine ELLE et se demande pourquoi la styliste n'a pas jugé important de dénicher une tenue mettant en valeur l'actrice.
Elle aimerait que les griffes allant jusqu'au 44 fassent apparaître dans leurs campagnes des femmes faisant un vrai 44.
Son message
À ses yeux, il faut à tout prix réussir à se libérer de cette attention démesurée que l'on donne au corps dans notre société : "Once you free yourself from that jail, it's just a different life".
Par Lise Huret, le 15 avril 2020
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Autre temps, autre manière de concevoir les corps.