La Boston de Birkenstock : le nouveau must have ?
À mi-chemin entre le sabot orthopédique et la pantoufle en fin de vie, le modèle Boston de Birkenstock n'avait a priori rien pour séduire la gent fashion. C'était cependant sans compter sur l'impact conjugué de la tendance normcore et de la montée en puissance de la "valeur confort" sur les envies des trendsetters…
Les débuts
En 1979, Birkenstock compte de plus en plus d'adeptes. Des stakhanovistes du confort pour qui la griffe décide de faire produire un modèle de sandales susceptible de garder leurs pieds au chaud une fois l'été terminé. La Boston - une paire de sabots ergonomique munie de la fameuse semelle en liège de la griffe allemande - devient alors rapidement le prolongement saisonnier de l'Arizona et ne tarde pas à se voir adoptée par les étudiants américains (qui les arborent dans les années 80 comme un symbole de la contre-culture), mais aussi et surtout par toutes celles et ceux qui ont fini par devenir accros au confort des créations Birkenstock. Pour autant, elle reste considérée par la majorité des consommateurs comme une "ugly shoe" incompatible avec une allure digne de ce nom…
Montée en puissance
Lorsqu'en 2009, Oliver Reichert s'empare de la direction de Birkenstock, l'entreprise est une vieille dame fonctionnant de manière désorganisée et appréciée uniquement des individus soucieux du confort de leur voûte plantaire. L'ex-joueur de football américain entreprend alors d'optimiser le fonctionnement des usines, investit dans de nouvelles machines et mise sur l'innovation en repensant la composition de la fameuse semelle en liège de la griffe. En quelques années, il parvient ainsi à faire de Birkenstock une entreprise dynamique. Il faudra cependant attendre 2013 et le coup de pouce de Phoebe Philo (voir ici et là) pour que l'entreprise voie sa cote exploser. Birkenstock devient alors une marque hautement prisée des fashionistas, qui ne jurent que par son modèle phare : l'Arizona. De son côté, la Boston demeure cantonnée à la frange dure des aficionados "normcore". Oui mais voilà, après des années de règne sans partage, les Arizona ont fini par lasser le milieu de la mode. Or, qui mieux pour prendre le relais que leur cousine bostonienne dont le confort douillet a séduit tous azimuts durant les périodes de confinement et dont la laideur la hisse aujourd'hui au sommet de la tendance "ugly shoes" ?
Des sabots adoubés par la fashion sphère
En 2021, l'esthétique sabots/mule se voit adoubée par certains créateurs (J.W. Anderson, Balenciaga, Bottega Veneta…). En promouvant le style pataud inhérent à ce genre de modèles, ceux-ci décomplexent les fashionistas. Ajoutez à cela un air du temps gorgé de désir d'authenticité, l'envie de produits non genrés ainsi qu'un snobisme assumé de la gent fashion (qui se matérialise par un amour immodéré envers les ugly clothes/bags/shoes) et vous obtiendrez des conditions propices à la "must havisation" de la Boston. Comme nous l'a d'ailleurs prouvé la dernière collection homme Dior…
Quelle matière pour ses Boston ?
En cuir texturé, elles s'avéreront bien plus citadines que leurs consoeurs en daim. Choisies dans une teinte fauve ou chocolat, elles diffuseront une aura chaleureuse, racée et décontractée.
En cuir noir lissé, elles se fondront assez facilement dans un look urbain, mais risquent de manquer de caractère.
En daim, elles afficheront une enveloppe douce, quasi organique, appelant à la vie au grand air, aux looks nonchalants et au farniente assumé.
Les modèles fourrés sont si confortables qu'une fois ceux-ci chaussés, on en oublie leur dégaine de miche de pain hirsute.
Dress code
On évitera de porter la Boston avec un pantalon long (voir ici et là). L'idée est plutôt de dégager la cheville afin d'alléger la silhouette.
Un look minimaliste-tailoring permettra de twister l'ADN cosy de la Boston (voir ici et là).
L'ajout de fines chaussettes est possible, à condition de porter son pantalon roulotté sur la cheville (voir ici).
Attention au combo jogging/chaussettes/Boston. Si l'on désire porter celui-ci à l'extérieur, chaussettes et jogging devront être de très bonne facture, sous peine d'apparaître complètement négligée.
On pourra contrebalancer la sexyness d'une mini-jupe avec l'effet "ceinture de chasteté symbolique" de la Boston (voir ici).
Le modèle en cuir marron texturé (mon préféré) se mariera très bien au trio pantalon cargo kaki roulotté sur la cheville/caraco blanc/blazer bleu marine, à l'ensemble short en jean boyfriend// ou encore au mix gilet jaune porté à même la peau et légèrement déboutonné sur le haut et le bas/jean large roulotté sur la cheville/marcel blanc un brin long.
Ce que j'en pense
Dans les années 2000, j'avais les Arizona en horreur. Aujourd'hui, je ne porte quasiment plus que cela. Autant dire que je n'accorde pas un crédit démesuré à mes actuelles réticences envers la Boston. Car si je la trouve effectivement pataude et peu flatteuse, je sens bien que le confort qui en émane pourrait bien tôt ou tard avoir raison de mes doutes esthétiques.
De manière générale, je trouve intéressant de voir l'anxiété diffuse de ces deux dernières années se matérialiser dans une envie non négociable de confort prêt-à-porter. Comme si l'irrésistible attrait du concept de "cocon" avait fait voler en éclat tous les "do" and "don't" du passé...
Par Lise Huret, le 25 avril 2022
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