Défilé Valentino Haute Couture printemps/été 2024 : le debrief
Entre conceptualisations excessives, collaborations tournant à l'exercice de style, collections portables mais frôlant le soporifique et artisanat d'excellence desservi par des codes maison peu flatteurs, les collections couture tâtonnent, cherchant à séduire une cible en pleine mutation. Et si la plupart peinent à convaincre, le vestiaire proposé chez Valentino sonne quant à lui on ne peut plus juste. Tour d'horizon de ses principaux points forts...
Ici, pas de démonstration de force stérile : la perfection discrète d'un plissé serré générant un tombé à la fois lourd et paradoxalement léger est préférée aux profusions de tulle ou de satin duchesse. Et lorsque des pièces au panache couture (voir ici et là) font leur apparition, c'est pour mieux embrasser un dress code plus "casual" que "tapis rouge". Un "quiet luxury" qui aurait pour une fois oublié d'être insipide. En matière d'élégance, on aurait tôt fait de se réfugier derrière les figures imposées du genre, tant chercher à insuffler un souffle nouveau à celle-ci peut s'avérer ardu, voire risqué. Un risque que Pierpaolo Piccioli prend pourtant sans hésiter. Sous ses doigts, l'universalité de cette notion se voit ainsi revigorée. L'élégance valentinienne s'inscrit dans l'air du temps, sans pour autant être tendance (ce qui la condamnerait à une obsolescence programmée). Les silhouettes s'enchaînent, aussi nonchalamment intemporelles que sublimement contemporaines.
En apposant un traitement couture à des éléments classiques (voire basiques), Pierpaolo Piccioli magnifie ce qui pourrait être perçu comme banal et offre à l'ordinaire une expression extraordinaire. Et cela fait mouche : le rêve se tisse sans tenir à distance celui ou celle qui observe ces silhouettes pourtant destinées à une poignée de privilégiés.
Le stylisme audacieux - où se télescopent volumes, matières et styles - nous incite à regarder notre propre garde-robe sous un nouvel angle. On pensera ainsi à ceinturer d'or nos pantalons larges marron, à porter nos jupes les plus amples avec un blazer masculin, à laisser une chance aux jupes-culottes et autres pantalons texturés (voir ici et là) que l'on portera de la manière la plus classique possible, à offrir un traitement tailoring à nos jupes Falbala et à apaiser le duo turquoise/violet via un aplat de beige.
Les associations de couleurs proposent des variations à la fois subtiles et audacieuses de combos que l'on pensait connaître par coeur. Le duo rose/rouge se mue ainsi en un pétillant tandem rose chimique/lie de vin tirant sur le marron, le mix bleu ciel/marron gagne en vitalité en misant sur une tonalité turquoise et sur des éclats chocolat irisé, tandis que l'harmonie de teintes marron/orange s'adoucit au contact d'une touche de lavande diluée. On pense également au mix vert/marron qui développe une certaine sophistication en allant vers un taupe discret et un vert gazon presque acide.
La mise en valeur par Pierpaolo Piccioli des "petites mains" (il déteste l'expression tant il la trouve non adaptée à la valeur des personnes travaillant à l'atelier) qui vinrent saluer à la fin du défilé. Le respect que le créateur italien porte à ces "ouvriers de l'ombre" est palpable et cela fait un bien fou.
Voir toutes les photos du défilé : https://www.vogue.com/fashion-shows/spring-2024-couture/valentino
Par Lise Huret, le 26 janvier 2024
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