Harper's Bazaar

Harper's Bazaar est tout comme Vogue un magazine de référence en matière de mode, bien que les deux magazines traitent le sujet un peu différemment. Vogue sera plus dans le concept, alors que Harper's Bazaar sera un peu plus concret et peut-être plus facile d'accès. Dans tous les cas, Harper's Bazaar a largement contribué à faire éclore un nouveau mode de consommation de la mode, et on lui doit de nombreuses mini révolutions qui ont fait de la presse féminine ce qu'elle est aujourd'hui. Avec plus de 142 années d'existence au compteur, il est intéressant de se plonger dans l'épopée Harper's Bazaar…
Harper's Bazaar Tout a commencé en 1867, lorsque deux frères américains, les frères Harper, décident de créer un magazine de mode. Ce sera le premier des États-Unis. Leur concept est de fournir un outil pratique à la femme désirant se tenir informée de ce qui se passe au niveau de la mode. A cette époque, le must en terme d'élégance est ce qui se fait en Europe, c'est pour cela que les Harper vont s'inspirer très largement d'un magazine allemand déjà existant ("Der Bazar"), et que les illustrations du magazine seront réalisées à Paris, puis envoyées en Amérique.

La majeure partie des pages de l'hebdomadaire sont consacrées à des reproductions de robes haute couture qui sont détaillées très précisément grâce à des textes explicatifs. Le Harper's Bazaar est alors un magazine au tirage moyen qui suit sa route tranquillement, sans heurts, ni gloire. Il faut attendre 1913 pour qu'un magnat de la presse, William Randolph Hearst, s'empare des commandes et amorce l'ascension du Harper's Bazaar.

Il a pour but de concurrencer, Vogue et s'y attellera de toutes ses forces. Il introduit la photographie dans ses pages, se débrouille pour y insuffler à ses modes ce qu'il faut d'espièglerie fine et de bon goût aristocrate, en y faisant participer Lady Randolph Churchill, la comtesse de Warwick et la couturière et écrivain lady Duff Gordon qui officie sous le pseudonyme de Lucille.Harper's Bazaar Il faut néanmoins trouver une marque de fabrique pour Harper's. En 1915, Hearst résout le problème en embauchant un ancien collaborateur de Poiret, Erté, dont les frêles esquisses racées seront désormais associées au magazine. À 10 années d'intervalle, Hearts débauche à coup de contrats mirifiques deux personnages clefs de chez Vogue : en 1922, c'est le photographe De Meyer qui rejoint les équipes de Harper's Bazaar et en 1933 c'est au tour de Carmel Snow de changer de bord.

C'est avec l'arrivée de cette femme au poste de rédactrice en chef que tout va changer, et que le magazine va entrer dans la légende, voire contribuer à la créer. Après avoir passé 11 années chez Vogue, elle a une vision très précise de ce qu'elle veut faire avec Harper's Bazaar : quelque chose ayant trait du concept "un esprit sain dans un corps sain". Elle développe l'idée d'un magazine destiné aux "well-dressed women with well-dressed minds".

Elle emmènera son mensuel bien au-delà de la mode, et fera pénétrer dans les foyers américains un univers riche d'art, de reportages éclairés, de nouvelles pointues et de photographies avant-gardistes. Carmel Snow était réputée pour sentir le talent chez les gens, ce qui lui permit de rassembler autour d'elle un véritable vivier créatif, visionnaire et prêt à faire évoluer les choses.Harper's Bazaar Elle va trouver en la personne de Alexey Brodovitch celui qui lui permettra de révolutionner l'approche de la mode et le design du magazine. Ce dernier est un photographe russe à l'esprit moderne, passionné par l'expressionnisme. Lorsque Carmel Snow découvre son travail lors d'une exposition new-yorkaise, elle sent immédiatement que c'est l'homme qui lui faut. Il sera donc pendant plus de 20 ans - de 1934 à 1958 - son directeur artistique.

C'est lui qui fera cohabiter texte et photos, chose jusqu'alors jamais vue. Il brouille les codes, juxtapose, découpe, utilise différentes typographies, joue des espaces vierges, aère les textes. Il transforme complètement les pages du magazine en plaçant dans un apparent désordre des photographies de jeunes femmes transgressant les poses conventionnelles. Elles sautent, courent, tourbillonnent, le tout conférant à un banal article sur le sport un dynamisme novateur et positif.Harper's Bazaar Il choisit des photographes qui sont à la proue de l'avant-garde : Man Ray, Martin Munkacsi, mais aussi Avedon ou Henri Cartier Bresson. Les illustrations d'Erte laissent la place à des séries de portraits qui deviennent l'une des caractéristiques du magazine. L'apparente spontanéité du travail de Brodovitch est le fruit d'une minutie extrême, il voue un véritable culte à la précision, seul moyen selon lui de pouvoir exprimer une humeur, une idée, un sentiment, quelque chose de volatile… Pour obtenir ce résultat, il passe des heures et des heures à déplacer et replacer les éléments.

Diana Vreeland est un autre personnage crucial de l'avènement du Harper's Bazaar : c'est notamment elle qui écrira que le bikini est la chose la plus importante depuis la découverte de la bombe atomique. Ces mots illustrent à merveille l'esprit caustique et libre de celle qui aujourd'hui reste la plus talentueuse des rédactrices de mode. Carmel Snow découvrit Vreeland au coeur de la haute société new-yorkaise, que cette dernière avait intégrée sans difficulté grâce à ses talents de "socialite".Harper's Bazaar Snow fut frappée par le sens du chic et de l'élégance de Diana Vreeland et lui proposa de rédiger une rubrique au sein de son journal. Vreeland sut immédiatement trouver le ton adéquat en s'adaptant aux souhaits et aux envies des lectrices, en cette période de crise économique. Il était en effet inutile et hors de propos de leur vanter les vertus de telle ou telle toilette hors de prix, elle entreprit donc de leur enseigner comment recycler certaines pièces de leurs gardes robes, ainsi que quelques règles faciles à appliquer pour être toujours élégante. Elle encouragea les Américaines à être inventives.

Sa rubrique "Why don't you…" avec son format original, sa vision pragmatique et éclairée de la mode et ses commentaires libres et enlevés, a été le buzz médiatique dont Harper's Bazaar avait désespérément besoin pour décoller. Les femmes se mirent à acheter en masse le magazine rien que pour lire la chronique de Diana Vreeland. Six mois après son arrivée dans le journal, Vreeland était promue rédactrice en chef de la section mode.

À ce poste, elle put sans difficulté imprimer ses idées et diriger ses lectrices où elle le voulait. Elle leur fit découvrir Elsa Schiaparelli et les encouragea à suivre ce qu'elle proposait. En dépit du fait d'être perçue comme quelqu'un d'excentrique et au caractère volcanique, elle était respectée du milieu et parvenait à faire accepter sa façon de voir les choses aux annonceurs et autres décideurs. Elle était toujours à l'affût de la nouveauté, encourageant les jeunes designers et plébiscitant les nouvelles techniques.Harper's Bazaar Elle a ainsi véritablement boosté la création et a permis aux Américaines d'assister à la mutation de la mode. Elle s'est efforcée de rendre portables les lubies des créateurs, elle voulait que le style descende dans la rue et pour cela elle en donnait le mode d'emploi à ses lectrices. Elle est également devenue une véritable icône de mode pour toutes les femmes de la planète. En 1963, après avoir révolutionné le ton et l'image de Harper's Bazaar, Diana Vreeland passa au camp adverse et intégra les pages de Vogue.

Brodovitch, Vreeland et Carmel Snow sont à eux trois parvenus à faire du Harper's Bazaar un magazine pointu tout en étant accessible, et ont réussi à être le trait d'union entre les artistes, les stylistes, les photographes, les écrivains et le public. Carmel Snow a dans ses pages mis en lumière Warhol, Avedon, Cocteau, Balenciaga et bien d'autres… Tant d'artistes qui lui vouaient une véritable admiration et un respect sans faille pour son sens du jugement et de l'esthétique.

En 1958, à 70 ans, elle laissa la place à sa nièce, Nancy White, qui après avoir suivi sa tante durant de nombreuses années avait intégré la marche à suivre, ce qu'elle fit avec assiduité. En 1970, la jeune Anna Wintour intègre les colonnes du magazine, mais elle a d'autres ambitions et rêve de diriger Vogue. C'est pourquoi lorsqu'en 1975, alors que le poste de rédactrice en chef du Harper's Bazaar lui file sous le nez, elle claque la porte et s'en va tenter sa chance ailleurs avec la suite que l'on connaît.Harper's Bazaar Le magazine à du mal à retrouver l'aura généré par le trio gagnant des années 60… Les rédactrices de mode talentueuses se suivent, mais pour des raisons diverses ne restent pas. C'est le cas de Liz Tilberis, qui entre en 1992 à la rédaction du Harper's et qui lui insuffle le dynamisme et la pertinence qu'il avait perdu. Cependant, le destin s'acharne sur le magazine, et Liz Tiberlis succombe à un cancer en 1999.

Depuis, le magazine a du mal à concurrencer Vogue. Alors que les éditions italiennes ou anglaises font preuve d'innovation et sont sans cesse à la recherche de la meilleure esthétique iconographique, Harper's Bazaar US cherche encore sa Diana Vreeland…
Par Lise Huret, le 25 septembre 2007
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11 commentaires
Tous les commentaires
AmandineIl y a 17 ans
Merci pour cet article supre intéressant sur le positionnement de ce magazine.
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ha vanIl y a 17 ans
quel talent la Vreeland , pourquoi pas un magasine qui continue cette voie ? au lieu de toutes les merdes que l'on voit !
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VéroïnIl y a 16 ans
Bonjour,

Connaitriez-vous l'actuel directeur artistique d'harper's bazaar ?
Sinon où pourrai je trouver l'info ?
Merci pour l'info ....
Cordialement
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VictoriaIl y a 15 ans
J'adore le magazine que vous avez décrit si brillamment! Où est-ce que vous avez trouvé la sixieme photo? (avec balenciaga + la fille qui monte l'échelle) Merci beaucoup!
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LéoIl y a 15 ans
Pour moi, ce magazine illustre à merveille le rapport de l'américaine avec la mode. Ultra pragmatique, avec des mode d'emploi servant à diagnostiquer le bon look pour telle ou telle soirée ou tel évènement, le Harper's Bazaar manque certainement de twist mais offre à ses lectrices la possibilité de comprendre les secrets d'un style toujours à la page.

Je déplore néanmoins le manque de prise de risque de cette parution américaine...
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karimaIl y a 14 ans
Lorsque j'étais en amérique, je suis tombé sur ce magazine et j'ai trouvé qu'il reflétait super bien l'image que j'avais du style américain. On y trouvait plein de mode d'emploi sur comment porter les produits de la saison, mais d'une manière beaucoup moins cheap que ce que l'on fait en france...

Depuis que je suis de retour, je continu à l'acheter de temps en temps dans les points presse internationaux. Ce qui me permet d'avoir une vision à la fois chic et pratique de la mode.
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martineIl y a 14 ans
Je ne sais pas trop quoi penser de ce magazine. Je l'ai eu plusieurs fois dans les mains, et je ne sais pas si j'aime ou pas. Le Harper's Bazar ne ressemble pas autres magazines. Il est plus explicatif, plus pragmatique tout en restant très haut de gamme. C'est différent de Vogue, c'est plus axé mode d'emploi. Mais il manque un peu de magie. Mais je crois que c'est bien d'acheter le Harper's Bazar ca donne une bonne vision de la mode américaine.
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MargautIl y a 14 ans
Je suis tombée sur ce magazine une fois lorsque j'étais aux USA et je dois dire que j'ai été agréablement surprise ! Les photos sont magnifique et le texte qui l'accompagne est très explicatif. Seulement je ne trouve aucun site français ou je peux le commander, auriez vous une adresse web ?
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clarkiIl y a 14 ans
Ayant vécu aux etats unis pendant toute mon enfance, j'ai connu le Harper's Bazaar avant même d'avoir connu Vogue ! C'est un bon magazine, je le préfère à Vogue.
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DoudouIl y a 14 ans
Salut, j'aimerais avoir l'adresse du Haper's Bazaar au Royaume-Uni.
Quelqu'un pourrais m'aider ? svp
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gabbyIl y a 12 ans
fondé en 1867 !!!!!! C'est fou qu'un magazine de mode puisse être aussi vieux ! je me demande si le Harper's Bazaar n'est pas le magazine comptabilisant le plus de parutions !
J'adorerais feuilleter l'une des premiers numéros. Ils ne doivent plus avoir grande chose à voir le Harper's Bazaar de maintenant mais ca doit être super intéressant de voir comment il a évolué.
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