Si le tee-shirt en vogue de l'été dernier était estampillé "Karl Who ?", cette année ce sont les modèles à l'effigie d'Anna Dello Russo - partis en moins de 24 heures sur le site Yoox.com - qui devraient valoir leur pesant d'hypitude. Il faut dire que depuis qu'elle a croisé le chemin de Scott Schuman, celle qui menait jusque là une vie tranquille de consultante prisée et de styliste photo reconnue a su gravir les marches de la célébrité de manière assez fulgurante...
Originaire de Bari en Italie du sud, Anna fut très tôt attirée par la mode : que ce soient les robes de sa mère ou les bijoux portés par les femmes de sa région, tout lui donnait envie de grandir très vite afin de pouvoir s'acheter toujours plus de vêtements.
À 12 ans, la fillette voue d'ailleurs déjà un véritable culte à Gucci (dont le logo est alors le Graal de bon nombre de fashionistas), à tel point que lorsque son père décide de l'emmener à Rome afin de lui offrir l'un des fameux sacs de la griffe, sa joie est indescriptible...
Cela dit, l'adolescente a beau afficher une réelle passion pour la mode, elle préfère privilégier sa culture générale en suivant des cours d'histoire de l'art et de littérature italienne ; ce n'est qu'une fois sa formation achevée qu'elle s'inscrira à un master de mode à Milan (elle comptera notamment parmi ses professeurs Gianfranco Ferré).
Peu après, elle se retrouve au magazine "Donna", où elle fait la connaissance d'Annalisa Milella. Travaillant pour Condé Nast, celle-ci se débrouille pour faire entrer la jeune femme chez Vogue Italie. S'en suivront 18 années de collaboration...
Petit à petit, Anna prend ses marques et se lie d'amitié avec les stylistes Domenico Dolce et Stefano Gabbana (alors au tout début de leur carrière), avec qui elle partage cette même fascination obsédante pour la mode. Elle les aide alors à élaborer leurs défilés et à définir la femme Dolce&Gabbana. C'est d'ailleurs elle qui leur conseilla récemment de convier à leur show la crème des blogueurs internationaux...
Styliste chez Vogue puis rédactrice en chef de Vogue Uomo pendant 6 ans, Dello Russo oeuvre également en tant que consultante pour de nombreuses maisons influentes. Ce cumul des casquettes finira par lui valoir son poste chez Condé Nast Italie, Franca Sozzani le jugeant incompatible avec la déontologie du magazine...
Après toutes ces années passées au coeur du monde de la mode, Anna Dello Russo s'est constituée un solide carnet d'adresses ; c'est donc totalement sereine qu'elle embrasse la carrière de freelance. Elle collabore notamment avec le Vogue japonais, dont elle deviendra rapidement la directrice artistique...
Cependant, son métier a beau la combler, lui permettre de faire autant de shopping qu'elle désire tout en étant en contact quotidien avec cette mode haut de gamme qu'elle adule, Anna Dello Russo ne va vraiment atteindre son plein épanouissement qu'en passant de l'autre côté du miroir. Nous sommes en 2007, ses looks constitués avec une attention quasi maniaque - elle en change jusqu'à 4 fois par jour en période de fashion weeks - attirent alors l'oeil de Scott Schuman et de Tommy Ton. Grâce à leurs blogs respectifs, ces derniers l'élèveront bientôt au rang de muse internationale...
Devant l'engouement suscité par ses tenues directement issues des podiums, Anna commence à considérer ses sorties en public comme un travail à part entière. Elle étudie ainsi ses panoplies avec attention, de manière à conserver son style tout en continuant à tenir en haleine son fan-club.
Cette collectionneuse invétérée de pièces haut de gamme - qu'elle ne porte jamais deux fois - se met alors à penser ses tenues 6 mois à l'avance. Désirant toujours plus éblouir groupies et street-stylers, elle mise sur des bijoux aussi baroques que voyants...
Obsédée par son image et convaincue de la nécessité d'être toujours au top, Anna Dello Russo ne laisse rien au hasard. Tout est en effet géré à la perfection, de sa silhouette de sylphide - entretenue grâce à un régime alimentaire pointu et des séances hebdomadaires de yoga - à sa garde-robe gigantesque qu'elle trie et conserve avec minutie (et qui va jusqu'à envahir sa cuisine), en passant par ses contacts avec la jeune garde montante du milieu et sa présence dans les nouveaux médias (elle possède son propre blog).
Elle assume par ailleurs totalement sa personnalité aux accents schizophréniques, n'hésitant pas à alterner séjours prolongés en Inde à pratiquer le yoga et excès fashion lors des fashion weeks. D'après elle, ce sont justement ces derniers qui font le sel de la mode...
Avenante (il n'est pas rare qu'elle gratifie d'un franc sourire ceux qui l'interpellent), fétichiste (ses armoires feraient se damner n'importe quel Bryanboy en herbe) et excessive (avec ce qu'il faut de bonne humeur et d'élégance pour ne pas tomber dans le ridicule), la DA du Vogue Japon est actuellement un être à part au coeur de la fashion sphère. Femme sans concessions, Anna Dello Russo risque fort de fasciner encore quelque temps les amoureux de la mode...
Par Lise Huret, le 05 juillet 2010
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