C'est un thème très actuel (celui de l'Évolution qui tourne court) qu'Alexander McQueen a décidé d'interpréter, sous les yeux ébahis d'une assistance découvrant la réalité du moment esthétisée comme jamais. Ainsi, alors qu'une vidéo diffuse en arrière-plan des images d'animaux en voie de disparition, le fond du podium est parsemé de fauves empaillés, posant le décor d'une collection revisitant les origines de la vie et s'interrogeant sur l'impact de l'homme sur une nature édénique.
Pour l'occasion, McQueen travaille ses pièces de prédilection (pantalons ultra skinny, imagerie victorienne, corsets de cuir...) en les mêlant à des atours d'un raffinement sans égal, afin de dessiner un ensemble aussi pointu et inattendu que possible tout en découvrant la possibilité de lier inventivité et portabilité.
Étoffes nervurées (tel le cœur d'un chêne centenaire), fleurs délicates emprisonnées sous une gaze translucide... la nature est clairement au centre de la première partie du show, jusqu'à ce qu'un crâne tissé sur une mousseline immaculée en sonne le glas. Les imprimés tour Eiffel cannibalisent alors jusqu'à l'étouffement des ensembles racés, tandis que les formes sablier émaillées de pierreries et moulant le corps de près évoquent la préciosité de ce temps passant irrémédiablement.
Avec une virtuosité technique implacable et une douceur d'exécution nouvelle, McQueen file une métaphore visionnaire, où la nature cède la place aux entreprises humaines. Aussi sombre soit-il, le propos a le mérite de faire renaître McQueen de ses cendres. Romantique sans s'égarer, ingénieuse sans démonstration ostentatoire et subtilement précise, cette collection entre sans difficulté au panthéon des meilleures de la saison...
©photo : Vogue