Alors que certains lui reprochent de ne pas prendre suffisamment de distance avec l'héritage McQueen, Sarah Burton continue cette saison de célébrer la mémoire de son mentor. Cela dit, loin de paraphraser stérilement l'oeuvre de feu Lee McQueen, la directrice artistique de la griffe lui offre ici une nouvelle dimension, où douceur et sensualité tendent à remplacer les omniprésentes pulsions "thanatos" de son prédécesseur.
À vrai dire, si le fétichisme, les références victoriennes et autres clefs de voute de l'ADN McQueen continuent de rendre dramatiquement saisissantes les toilettes de la maison anglaise, l'influence de Burton leur confère une allure plus féminine que jamais.
Et si la créatrice fut elle aussi - à l'instar de Karl Lagerfeld (Chanel) et Riccardo Tisci (Givenchy) - séduite par la faune et flore sous-marine, elle n'en parvient pas moins à se faire un brin plus subtile que ses confrères en mettant traitement couture, techniques modernes et raffinement universel au service de ses inspirations.
Dans la pratique, les ondulations de la jupe des méduses se muent ainsi en [basque à volutes|http://media.style.com/image/ts/slideshows/2011/fashionshows/S2012RTW/AMCQUEEN/DETAILS/00250m.jpg
], la robe des huitres en un subtil imprimé moucheté minutieusement matelassé, la texture des coquilles Saint Jacques en d'affolantes superpositions de voiles de mousseline, celle de certaines algues en de précieuses dentelles ou en de longues rangées de volants horizontaux, tandis que la faune engluée dans du pétrole se matérialise sous la forme de luisantes parures de cuir ajouré au laser. Et lorsqu'elle s'approche du premier degré, ce n'est que pour mieux le sublimer en ornant ses féériques bustiers de mosaïques de coraux et autres plumes de nacre.
On note également la présence de nombreux détails lingerie à l'évanescence libertine, offrant ce qu'il faut de douceur acidulée aux atours à tendance historique chers à la griffe. Déclinés par la suite dans un noir encre, ceux-ci permettent alors d'insuffler un twist SM à des toilettes que n'aurait certainement pas reniées la ténébreuse Maléfice.
Avec cette succession de toilettes - à la beauté aussi hallucinatoire que chimérique - pour déesses en goguette au bal du MET, Sarah Burton touche donc on ne peut plus juste. Même si, telle Camille Claudel vis-à-vis de l'enseignement de Rodin, elle devra forcément prendre un jour ses distances avec la grammaire McQueen, afin de laisser éclore sa propre rhétorique...
Par Lise Huret, le 05 octobre 2011
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