La bonne surprise Balenciaga
Lorsque Balenciaga annonça l'arrivée de Demna Gvasalia en tant que nouveau directeur artistique, je me dis que la maison parisienne continuait de privilégier le buzz sur la cohérence et que son expérience avec Alexander Wang ne lui avait pas servi de leçon…
J'avais en effet du mal à participer à l'engouement que suscitait la griffe Vêtements et ne parvenait pas à voir en Demna Gvasalia un créateur de génie. Ses thèses me semblaient intéressantes, mais leur matérialisation me laissait quelque peu sur ma faim. C'est donc assez dubitative que j'attendais ce dimanche 6 mars les premiers passages du défilé Balenciaga. Face aux silhouettes à la fois gorgées de l'esprit de Cristobal et empreintes d'une vision novatrice, je réalisai cependant rapidement que cet ex de chez Martin Margiela et Louis Vuitton avait bel et bien quelque chose à dire et que, canalisé par l'ADN d'une maison au passé mythique, son talent allait pouvoir s'exprimer "lisiblement". Dans les faits, cette collection A/H 2016-2017 reprend les codes et détails Balenciaga - tels que la tournure de certaines vestes, les décolletés châles (voir ici et là), le volume ample taille haute (voir ici et là) ou l'ampleur d'un bouillonné (voir ici et là) - et les traduit dans un langage tailoring/sportswear plutôt convaincant.
On note ainsi pêle-mêle que :
Les tailleurs à basques étroites possèdent suffisamment de rigueur et de second degré pour convaincre les jeunes femmes de les adopter.
Les parkas et autres doudounes ont tout du basique à haute valeur ajoutée.
Les trenchs retaillés en mode Cristobal brillent par leur volume insolent.
Associés à des escarpins bijoux, les fuseaux de ski apparaissent presque fédérateurs.
Les bombers et autres blousons en cuir acquièrent une distinction inédite en basculant légèrement vers l'arrière.
Les amples jupes genoux subtilement déconstruites renouvellent le genre avec audace.
Les jupes aux plis feuilletés exploitent avec brio leurs 3 dimensions. Ajoutez à cela le fait que - contrairement aux créations de Nicolas Ghesquière "époque Balenciaga" - les modèles imaginés par Demna Gvasalia semblent être destinés à toutes les morphologies et à tous les âges (à l'instar de ceux d'un Yohji Yamamoto), que la fusion sportswear/conceptuel/Balenciaga donne ici naissance à des silhouettes parfaitement portables, et que les sacs Barbès (clin d'oeil à Marc Jacobs ?), les écharpes doudounes et les escarpins de princesse sont certainement de futurs best-sellers et vous obtiendrez une première collection particulièrement prometteuse.
Au final, entre soin apporté aux détails, refus de proposer une collection fleuve, absence de salut final (afin de ne pas détourner l'attention du vêtement) et bizarrerie assumée au point de devenir désirable, Demna Gvasalia offre à la mode un véritable souffle libérateur. Reste simplement à espérer que pour son prochain défilé, Demna Gvasalia saura prendre un peu de distance avec l'esthétique Vêtements, qui eut parfois tendance à cannibaliser légèrement ses silhouettes de saison (voir ici et là)...
Voir toutes les photos : http://www.vogue.com/fall-2016-ready-to-wear/balenciaga
Par Lise Huret, le 08 mars 2016
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Surtout le tailleur avec la taille et les hanches marquées :) .