Doit-on à 34 ans assumer les outrages du temps ou au contraire tout faire pour les endiguer ? Telle est la question qui parasite actuellement mes pensées. Dans ce contexte, certaines photographies issues de la dernière édition du Calendrier Pirelli m'ont particulièrement interpellée...
Cette année, au sein du fameux calendrier Pirelli, point de naïade dénudée, de visage sublimé par un savant maquillage, de beauté à l'insolente jeunesse ou de mannequin au corps vierge de toute vergeture : l'air du temps est passé par là et a balayé toute notion de perfection au profit d'une esthétique un brin plus complexe.
Sous l'objectif de Peter Lindbergh, ce sont en effet des actrices qui prennent la pose. Des actrices dont les dates de naissance font le grand écart et dont on a cherché à livrer un portrait "authentique".
Sur les clichés du célèbre photographe (qui avait déjà oeuvré à deux reprises pour le fabricant de pneumatiques), on distingue ainsi ce que Photoshop a trop souvent tendance à gommer, à savoir tendre relâchement de peau, front légèrement marqué ou encore ridules sillonnant le contour du regard.
Autant de minuscules détails qui, s'ils peuvent nous désespérer lorsqu'ils nous concernent personnellement, confèrent ici au visage et au corps une histoire, une identité, une singularité. On réalise alors, émue, que bien que privées de la tension de l'extrême jeunesse, ces femmes n'en demeurent pas moins hypnotisantes, désirables et captivantes.
Ciselés par les aléas de la vie, les déceptions, l'action des radicaux libres, les choix alimentaires, les joies et les remises en question, ces physiques d'actrices gagnent en humanité, à tel point que l'on tomberait presque plus facilement amoureux d'elles maintenant qu'il y a 20 ans. Il faut dire qu'il émane de leurs "imperfections" une densité qui se révèle au moins aussi désirable que la perfection lisse d'un épiderme de moins de 25 ans.
Alors bien entendu, ces femmes sont hors norme de par leur capital génétique exceptionnel et leur métier qui leur permet de se faire chouchouter autant que nécessaire. Pour autant, les photos de Lindenberg n'en font pas moins du bien, tant notre réalité se rapproche plus de la beauté imparfaite de ces femmes sublimes que de celles des mannequins retouchées à l'extrême des publicités pour gélules anti-rides.
Et si cette série de photos ne gommera évidemment pas mes angoisses face au temps qui file, je pense qu'elle participera à me faire envisager la problématique beauté/vieillissement sous un angle un peu plus bienveillant. À une époque où les images issues du milieu de la mode ont davantage tendance à complexer qu'à inspirer, cela n'est déjà pas si mal...
Par Lise Huret, le 30 novembre 2016
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27 commentaires
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C. •Il y a 8 ans
Quelle bonne idée cet article. Merci Peter Lindbergh, ça fera au moins un photographe qui ne participe pas à l'oppression généralisée qu'on propose aux femmes.
Autant la pseudo-révolution de l'année dernière m'a laissée de marbre, voire irritée (et on se souvient des débats passionnés sur ce site), autant cet opus me touche, la célébration de la beauté physique à tous les âges, la sélection de ces actrices sublimes, le mélange de confiance en soi et de vulnérabilité que ces images dégagent.
ça me parait jeune quand même à 34 ans d'avoir déjà l'impression de devoir assumer les "outrages du temps".
Avec un peu de gym et pas trop d'exposition solaire mes copines cinquantenaires et moi ne nous sentons pas vraiment encore "outragées" !!!
En fait je pense que ce sont les premiers signes de vieillissement qui me perturbent et ce justement parce que j'ai 34 ans. Je ne pensais pas qu'à 34 ans j'aurais autant de cheveux blancs, autant de petites rides. Ce n'est pas tant sur le plan esthétique que sur le plan symbolique que cela me dérange. Comme si à 34 ans, j'entamais déjà cette lente et longue descente vers la vieillesse...
Je pense que dans 10 ans je serai beaucoup plus sereine car j'aurai accepté et composé avec tout cela, mais aujourd'hui cela me trouble pas mal ;)
Comme vous dites, ces femmes sont hors normes. Néanmoins, saluons cette initiative d'un photographe hors normes lui aussi. Âge et beauté ne sont pas contradictoires, ils envoluent. Il y a la beauté de la jeunesse et le beauté de la maturité. Ce que nous nous disons tous les jours face à nos miroirs...
Robin Wright est peut-être celle qui assume le plus et le plus naturellement son âge.
Peter Lindbergh est LE photographe qui m'a fait aimer la photo, l'image, la mode, et dont les clichés m'ont bouleversée dans les années 90, je possède la plupart de ses ouvrages l'on peut dire que c'est mon photographe de référence. Ceci étant dit je n'aime pas son calendrier. J'ai un peu l'impression d'être une hérétique en écrivant ces mots mais je trouve ces portraits d'une gravité un peu "contrainte", me donnant l'impression d'être emmenée de façon très convenue et sans surprise dans un univers qu'il a déjà tellement exploré et de façon beaucoup plus fine et magistrale. C'est comme s'il se plagiait lui-même avec des actrices qui jouent leur propres rôles... ce qui est sublime chez Lindbergh c'est d'avoir fêlé la beauté, égratigné la perfection alors qu'avec ces comédiennes (superbes évidemment) dont l'émotion est le gagne-pain je trouve que justement que l'on passe à côté de l'émotion devant des visages au bouleversement attendu, orchestré, des portraits un peu tristes . Ma déception est à la hauteur de l'immense admiration que je lui porte... bref c'est chiant :)
Le mot "outrage" est sûrement trop fort. Il n'exprime pas la réalité physique mais plutôt la violence psychique que peuvent provoquer sur moi les tous premiers signes du vieillissement. J'ai l'impression d'être encore une enfant et mon visage me dit le contraire...
J'ai 4 ans de + que toi et je me retrouve dans ce que tu dis ! Depuis mes 35 ans à peu près, j'ai en effet l'impression d'un glissement d'autant plus troublant que jeune on me donnait systématiquement 5 ans de moins que mon âge. Depuis mes 35 ans, c'est fini on me donne mon âge et c'est un peu plus violent peut-être psychologiquement ce basculement. Les cheveux blancs sont arrivés à 25 ans, mais cette ride du lion qui ne se défroisse plus, cette ridule au coin de l’œil qui n'est pas due à un manque d'hydratation... C’est étrange à apprivoiser.
Oh mais je me sens super jeune, même trop... mon cerveau a sûrement un peu de mal à accepter que mon visage ne se sente pas aussi jeune que moi ;) Mais tout va bien !
Lise, au contraire sur la dernière photo de toi sur IG, on dirait que tu reviens de ma mer après avoir fait l'école buissonnière avec ta copine de lycée ;)
Nicole Kidman est tellement mieux que l'alien que l'on voit sur les tapis rouges! C'est bizarre elle avait tellement fait de chirurgie qu'on ne la reconnaissait plus et là elle oui. On a dû la photoshopper pour remettre des rides et détendre les lèvres siliconées parce qu'elle n'a plus rien à voir avec les dernières photos que j'avais vu d'elle!
Je me faisais très exactement la même réflexion sur N. Kidman. D'ailleurs sur la photo couleurs où elle pose pour la présentation "2017 calendar Pirelli unveiled " reprise par le lien elle est à nouveau extra terrestre ! Et ne soyons pas dupes, les mini toutes fines ridules sur les visages de J Moore et de R. Wright ne sont pas les vraies rides ( plus profondes ) de femmes du même âge qui ne connaissent ni injection, ni peeling, ou autre procédé "rajeunissant ". Mais il faut reconnaître que le travail sur leur peau est admirable car il n'y a pas d'effet figé.
Je comprends bien ton angoisse. Maintenant les trentenaires et plus veulent et parviennent souvent à garder leur légèreté et leur esprit de jeunesse et notre visage nous dit le contraire. A 42 ans j'ai sauté le pas grâce à une amie dermato que je trouvais très naturelle et fraîche. J'ai fait du botox pour la ride du lion et des injections d'acide hyaluronique pour les plis nasogéniens sans pour autant les gommer entièrement. Pour les cheveux blancs j'ai opté pour la couleur végétale aussi très naturelle et qui apporte une réelle brillance et soigne les cheveux.. Ces petites retouches m'ont vraiment aidée et par exemple je sais mieux ce que je peux ou non accepter. Elle m'avait mis un peu de botox dans les rides des yeux mais je trouvais que cela m'enlevait de l'expressivité donc je me limite à la ride du lion qui elle me donne un air soucieux et fatigué qui n'est pas moi. Mon amie m'a dit que je le faisais au bon moment avant que les rides ne soient trop marquées et que les retouches n'effectuent un changement trop radical. Je n'ai pas un visage de vingt ans mais je me sens comme tu le dis pour moi si bien moins outragée par le temps et cela libère l'esprit pour sa vie sociale et intellectuelle.
moi je trouve que Nicole, elle a abusé. Elle fait artificielle, maintenant. En tout cas, si ça peut te rassurer, bizarrement à ... (houla) moins de 2 ans de la cinquantaine, on angoisse moins qu'à 40 (enfin, moi c'est mon cas). j'angoisse bcp plus pour la santé (la moindre fatigue ou courbature a bcp plus de conséquences) et je t'assure que ça, c'est bcp plus flippant que 3 rides de plus sur le visage. Perso, je préfère être ridée et en pleine forme (sport), que pas ridée et grabataire (pour moi le grabatairisme commence vite: ne plus pouvoir faire de sport d'une semaine et je flippe!!! :-)
chacun ses angoisses, mais je t'assure que le corps qui faiblit, c'est LE truc que je ne veux pas...
J 'ajouterai juste un petit commentaire : nous avons tous le droit de vieillir ,non??? Il faut lutter contre l 'apartheid de l 'âge , contre la dictature du jeunisme .
Ton article est très bien écrit et ces photos qui l'accompagnent, superbes, bien que manquant un peu de légèreté à mon goût !
Et oui, il n'est pas facile d'accepter le temps qui passe, mais c'est un chemin par lequel nous devons tous passer.
Le plus important étant, il me semble, de trouver la paix en soi.
Je te souhaite de très bonnes fêtes Lise !
Christine
un article intéressant : vieillir au féminin, dans le monde diplomatique du mois de décembre.
"En avril 2016, en Suisse, une octogénaire a demandé — et obtenu — une aide au suicide car, « très coquette » selon son médecin, elle ne supportait pas de vieillir. Un signe du stigmate particulier attaché à l’avancée en âge chez les femmes. En France, deux personnalités se sont emparées de cette question longtemps négligée par les féministes : Benoîte Groult et Thérèse Clerc, toutes deux disparues cette année."
la suite en page 16 du Monde Diplo : Vieillir au féminin, un article de Juliette RENNES