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Chronique #153 : Mon bureau, évolution et envies
Avec sa silhouette studieuse et son bois usé par mes aînés, le bureau de ma chambre d'enfant - puis d'adolescente - fut des années durant mon château fort, mon île, ma tanière. Situé dans une maison immense où s'ébattait une fratrie de 6 enfants, il était l'endroit où je retrouvais mon unicité. Je n'étais alors plus l'une des 6, mais le petit démiurge de mon propre univers…
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Il me suffisait alors de m'asseoir à ce bureau sans prétention pour que l'extérieur se floute, que les problèmes s'éloignent et que la nécessité de créer s'impose.
Or, une fois envolée du nid familial, je n'ai jamais plus réussi à recréer cette bulle quasi mystique. Il faut dire que mon bureau est devenu au fil du temps un élément du mobilier comme un autre, aussi fonctionnel qu'interchangeable. Il me suffisait en effet de poser sur une table quelconque mon laptop, mon clavier, ma souris sans fil, mon agenda et un gri-gri (une fleur, un gadget souvenir, l'étiquette de la griffe d'une amie...) pour que celle-ci devienne mon lieu de travail. Au fil des ans, j'ai ainsi fini par accepter cette nouvelle neutralité, cette dématérialisation, ce pragmatisme extrême à des années-lumière de la créativité fertile que générait chez moi le vieux meuble de mon enfance.
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Alors je rêve. Je me promène sur la toile en quête d'inspiration. J'élabore les contours de mon fantasme. Je sais que ledit bureau ne prendra pas place dans un espace fermé (j'écris mieux lorsque la vie s'agite autour de moi) et devra être suffisamment massif pour ne pas donner l'impression de s'excuser d'être là. Je veux une bulle blindée, mais transparente. Je ne veux pas m'intégrer au design de la maison (voir ici), je ne veux plus de ce minimalisme photogénique que je continue de trouver esthétique (voir ici et là) mais qui ne correspond plus à mes attentes. Je veux un meuble qui me touche, un compagnon chaleureux. Si je le pouvais, je choisirais le bureau de mon grand-père au plateau partiellement recouvert de cuir, aux tiroirs profonds, aux pieds gainés de cuivre et à l'odeur si particulière (mélange d'encre et de tabac). À suivre...
Par Lise Huret, le 03 juin 2020
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Merci pour cet article, j’aime beaucoup ces introspections que tu nous livres.
Peut-être pourrais-tu chiner ce fameux bureau ? Un meuble qui aurait un vécu. N’y-a-t-il pas de petits brocanteurs près de chez toi ?
Je te souhaite un bel après-midi,
Affectueusement