Entre chemin initiatique quotidien, joie viscérale et messe aquatique, le surf est devenu en quelques semaines un élément essentiel à mon équilibre. Récit d'une session ordinaire...
Enfiler avec difficulté sa combinaison en néoprène. Retrouver les visages ensommeillés mais joyeux des surfeurs venant se frotter aux vagues matinales. Écouter en marchant sur le sable les péripéties passées des uns et des autres : "Enfant, je surfais ici. Une fois, mon leash s'est pris dans un rocher, impossible de revenir à la surface... et puis j'ai réalisé qu'un leash cela s'enlève en une seconde...". - "Il y a 10 ans, j'ai été pris par un courant d'arrachement qui m'a emmené au large, je ne voyais plus la plage. J'ai mis des heures à revenir. Ensuite, j'ai arrêté le surf. Je reprends aujourd'hui". - "Hier, mon leash s'est enroulé autour de mon cou sous l'eau, le surf est parti avec la vague, j'ai cru que c'était fini". Scruter l'océan afin d'essayer de comprendre la mécanique des flots, entre courants, séries de vagues et bancs de sable immergés… Effectuer l'échauffement sur la plage et se rendre compte que les squats qui nous coûtaient tant il y a quelques semaines de cela sont devenus une formalité. Entrer dans l'eau et sentir les grains de sable me masser la plante des pieds. Scanner le mouvement des vagues, bander les muscles, résister à leurs assauts. Choisir le bon moment pour se glisser sur sa planche, relever le buste et passer une première montagne ourlée d'écume. Fendre alternativement la surface avec ses bras, sentir ses épaules devenir incandescentes, mais continuer, continuer, continuer. Accepter de se faire balayer par un mur d'eau inévitable. Détecter une houle prometteuse, commencer à ramer vigoureusement, se sentir porter par une force magistrale, sauter sur son surf et éprouver la plus délectable des sensations en dévalant la courbe de ce micro monstre aquatique. Se retrouver à attendre la vague avec 15 autres surfeurs, assise sur son surf à 200 mètres du bord, le tout dans une ambiance rieuse et détendue. Avoir l'impression (à tort) d'apercevoir un aileron d'orque et tenter - afin de ne pas céder à la panique - de se remémorer les meilleurs moments de "Sauvez Willy". Réaliser qu'en ramant dans un certain sens, on peut réussir à passer une vague immense juste avant son point de cassure. Essayer - en vain - d'éviter une déferlante, sentir son surf entraîné par cette dernière, être traîné sous l'eau à sa suite, faire le vide, se rappeler que l'on peut rester sous l'eau bien plus longtemps que ce que l'on pense et finir par remonter à la surface. Se faire piquer sa vague par un petit blond de 10 ans au teint caramel. Trouver l'eau de mer beaucoup trop salée. Réussir à se lever au moment T grâce aux conseils d'une surfeuse inconnue. Croiser une méduse. Faire un avec sa planche pendant un court laps de temps. Croiser deux méduses. Glisser en duo avec celui qui partage mes jours et mes nuits. Croiser trois méduses… Observer sous l'eau le ballet fracassant des vagues. Sortir de l'eau en prenant garde de ne pas se faire arracher sa planche par une dernière vague. Se laisser tomber sur le sable. Sentir l'épuisement envahir chaque parcelle de son corps. Remercier l'Océan d'avoir été clément. Attendre le professeur et les autres élèves. Débriefer, se faire vanner, évoquer ses angoisses sans avoir l'air d'y attacher de l'importance. Remonter vers la digue, le pas fatigué mais le regard lumineux. Echanger des sourires sans avoir besoin d'en dire plus. Poser nos surfs et se renseigner sur les horaires du lendemain. Car aussi exténués que nous soyons, nous n'avons alors qu'une idée en tête : y retourner.
Par Lise Huret, le 17 septembre 2020
Suivez-nous sur , et
Le look de la Parisienne - Printemps 2025
EN SAVOIR PLUS
Jupes : tendances printemps/été 2025
EN SAVOIR PLUS
Comment porter le pantalon noir ?
EN SAVOIR PLUS
Comment porter la robe longue à 50 ans ?
EN SAVOIR PLUS
27 commentaires
Tous les commentaires
Estarla •Il y a 4 ans
Ton récit me fascine autant qu'il me donne de frissons... Le surf est à la fois beau et terrible. C'est vrai qu'on peut rester sous l'eau plus de temps qu'on le croit ? Comment ça s'explique ? D'ailleurs pour bien apprendre à surfer, on doit travailler aussi sur ses capacités d'apnée ?
Si tu es prise dans une vague, tu n'arrives à en sortir que lorsque cette dernière perd en puissance. Donc oui, tu peux rester plus ou moins longtemps sous l'eau.
L'apnée fait effectivement partie des choses à travailler lorsque tu surfes ;)
J'avais mal lu ta phrase, en fait. J'avais compris que nos capacités à rester sous l'eau sont plus importants que ce que l'on peut croire. .. ce serait une bonne nouvelle ! Bonne week-end Lise
Je pense que c'est bien cela, en fait :) souvent on panique et on se dit qu'on ne pourra pas "survivre" à ces quelques secondes sous la surface, mais en fait, (avec certainement une part d'entraînement) en bloquant notre respiration et en ne paniquant pas (ce stress qui dévore tout même l'oxygène !) on pourrait rester des dizaines et des dizaines de secondes... largement le temps de laisser passer une vague :) d'ailleurs Lise merci pour cette petite pause que tu nous offres 💙
Magnifique texte, merci beaucoup! ça fait des années que je me débats avec les vagues et j'ai enfin admis que ce sport me fait trop peur… la claque de la vague, le choc de la planche contre ma boîte crânienne, les courants qui risquent à tout moment de nous emporter au loin - cette fois ça y est, je ne peux plus. Mon mari est un vrai mordu et c'est dur pour lui que je ne partage plus cette passion avec lui. Mais je continue de ressentir cette fascination pour la mer! D'ailleurs on part à Sagres la semaine prochaine :)
Tu sais je pense qu'il ne faut jamais se forcer, surtout avec ce genre de sport.
Tu as le droit de ne pas avoir de coup de coeur pour le surf. Ce genre de chose ne se décrète pas ;)
Tout à fait impressionnant ! Pour avoir admiré de l’extérieur les essais plus ou moins réussis de surfeurs aguerris, grâce à ton récit, j’ai une idée plus claire de ce qu’il se passe « à l’intérieur ». C’est fascinant cette volonté de jouer avec cette force brute (parfois brutale ?). Je sais de mon côté que je n’oserais jamais mais j’imagine à quel point cela doit être grisant quand on réussit. Merci encore pour ce partage.
Lise, j'étais à côté de toi sur la planche, j'ai adoré 😀
En vrai j'ai testé quelques fois le surf, mais seulement en mode body surf, impossible de me relever, je n'ai aucun équilibre, ce sport n'est pas pour moi 🙃Par contre, quand l'occasion se présente (rarement !) regarder les surfeur.s et surfeuse.s est un plaisir sans limite 😍
En te lisant, j'avais l'impression de surfer... Mon rêve! Qui ne se réalisera jamais - j''habite Lille! Mais je continue à fantasmer sur Brice de Nice et sur Point Break...
Ne jamais dire jamais ! Je suis née dans le Massif Central, j'ai fais mes études à Lille, j'ai rencontré mon mari à Paris, nous avons conçu Charles à Vancouver, avons vécu à Florence, puis au sommet d'un gratte-ciel à Toronto... et aujourd'hui je suis face à l'océan. La vie prend parfois des chemins détournés pour nous amener vers nos rêves ;)
Oh oui, c'est certain ! Ma planche s'est raccourcie, affinée. Ce qui avant était un challenge est devenu quasi naturel. Mais je n'en suis encore qu'au tout début. Je n'ai ni l'aisance, ni la connaissance, ni le savoir faire, ni la technique de ceux qui pratiquent depuis longtemps. Je sais que cela va prendre beaucoup de temps. On dit qu'il faut 5 ans pour savoir vraiment surfer.
Il faut être humble. Il y a trois jours, je suis tombée dans une vague, ma planche m'a ouvert le cuir chevelu. 5 points de sutures et interdiction d'aller dans l'eau pendant une semaine.
Ce n'est pas facile de comprendre pourquoi je me blesse autant alors que je ne suis jamais aussi heureuse que dans l'eau. Mais je vais finir par trouver la réponse ;)
J'ai commencé par survoler les premières lignes pensant zapper exceptionnellement cet article ... pas pour moi ... et puis je suis revenue en arrière après avoir été happée par tes mots et cette passion qui affleure si bien !
Bravo car comment faire partager une passion ... ça ne s'explique pas, pourquoi ça et pas autre chose ... moi c’était les chevaux et le jumping et je n'ai jamais su pourquoi ... comme j'ai pu adorer ça, mais seuls les passionnés peuvent comprendre !