Les bijoux squelette de Christian Lacroix

Pour la saison prochaine, certains stylistes ont tenté de rendre le morbide esthétique. S'inscrivant dans la lignée de Damien Hirst, ces derniers se sont inspirés de notre ossature avec pour espoir de le fashioniser. En véritables thanatopracteurs de luxe, ils ont ainsi mis sur le devant de la scène ce qui était réservé jusqu'alors aux fêtes d'Halloween…

Nombreuses sont celles à avoir succombé au charme des crânes customisés - version girly - des Bijoux de Sophie, sans pour autant virer dark ou adoratrice de Satan. Il faut dire que depuis quelques saisons, le design tête de mort s'est largement diffusé, au point d'en devenir trendy. Du coup, ce qui auparavant était synonyme de rébellion et d'univers sinistre est aujourd'hui complètement dé-codifié, comme le fut le keffieh à son heure. Le crâne en diamant de l'artiste plasticien Damien Hirst - qui est actuellement l'une des pièces phares de l'art contemporain - montre à quel point le monde créatif est attiré par la désacralisation de la mort (ou tout du moins s'attelle à l'apprivoiser) en remplaçant le macabre par du glitter. Exit donc le noir obscur, les graphismes obsolètes premier degré et la dégaine à la Marylin Manson ; pour la saison prochaine, on réinterprète le squelette de la manière la plus chic qui soit. Ce dernier est en effet devenu le point de départ de créations sophistiquées, délaissant toute connotation macabre au profit d'une nature tout simplement mode. Les soeurs Rodarte imaginent ainsi un bustier composé de bandelettes ivoire, fortement inspiré de la cage thoracique. De son côté, Alexander McQueen dessine nos côtes en trompe-l'oeil à coups d'impressions tour Eiffel, tandis que Sandra Backlund nous tricote une ossature arachnéenne. Chacun d'entre eux oeuvre avec une grande subtilité, alliant brillamment iconographie post mortem, mode et raffinement… On note cependant la présence de pièces légèrement moins subjectives et manquant nettement de subtilité (même si elles ont le mérite de confirmer la remasterisation de l'imagerie dark). Il en va ainsi du plastron squelette de Lacroix qui, entre rite tribal et trophée de guerre, a quelques difficultés à devenir un bijou digne de ce nom. En effet, l'imposant collier nous évoque bien plus une visite au muséum d'histoire naturelle qu'une parure de princesse masaï. Dommage... Malgré tout, les bracelets issus du même thème et faisant preuve d'un peu plus de délicatesse pourraient bien se retrouver rapidement à notre poignet. Il est vrai que ces derniers possèdent le parfait ADN pour succéder à nos sautoirs tête de mort…