Et si l'on crut un temps que les patronages revus en mode brindille, les égéries nineties et les boots affichées à plus de 1000 euros tiendraient également à distance la clientèle haut de gamme, c'était sans compter sur la capacité d'Hedi Slimane à créer un univers hypnotisant, pile dans l'air du temps et au caractère hautement addictif.
Car oui, Hedi Slimane fait vendre : aussi critiquée fut sa collection automne/hiver 2013/2014, celle-ci ne s'en pas moins extrêmement bien vendue, bon nombre de pièces affichant un prix à 4 chiffres s'étant rapidement retrouvées en rupture de stock (voir ici et là). Sans parler de son formidable impact sur le monde de la mode. Considéré par beaucoup comme le "nouveau pape du grunge", Hedi Slimane influence en effet la rue comme peu de créateurs l'ont fait récemment.
En occupant l'espace médiatique via une attitude mégalo-iconoclaste, en imposant une fille Saint Laurent en totale osmose avec les belles grungy de son "Diary" et en n'autorisant aucune contestation de sa légitimité, Hedi Slimane se pose par ailleurs en capitaine capable de définir un cap et d'affronter vents et marées pour affirmer sa vision. Selon Serge Carreira, spécialiste du luxe et professeur à Sciences Po, le créateur s'est ainsi imposé en tant que "chef d'orchestre de la marque, définissant une attitude, un univers et agissant sur plusieurs niveaux".
Reste à savoir si la stratégie d'Hedi Slimane s'avèrera pérenne sur le long terme. Il lui faudra pour cela réussir à faire évoluer son style, mais aussi miser davantage sur une qualité irréprochable que sur des effets de manche marketing tentant de faire artificiellement monter en gamme la griffe (on pense notamment aux boots à 5695 euros). Car, comme le remarque Serge Carreira, "il faut être extrêmement vigilant à cette problématique des prix : il ne suffit pas d'avoir des prix très élevés pour dire que l'on est luxe".
Par Lise Huret, le 26 novembre 2013
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