Les androïdes, futures top-modèles ?
Mêlant teint opalin, bouche cerise et regard noisette presque mutin, la dernière influenceuse ayant attiré l'oeil d'Alessandro Michele s'avère particulièrement jolie. Oui mais voilà, il se trouve que la jeune Erica manque un brin… d'humanité : la dernière née du professeur Hiroshi Ishiguro - le dieu de la robotique réaliste - est en effet 100% artificielle. Face à tant de perfection docile, pourquoi ne pas essayer d'imaginer les avantages qu'aurait l'industrie de la mode à remplacer un jour ses mannequins de chair et d'os par des androïdes ultraréalistes ? Petite liste non exhaustive...
Oubliés les boules de coton ingurgitées pour couper l'appétit et les buffets de petits fours laissés intacts en backstage : contrairement à leurs consoeurs de chez Elite aux besoins vitaux agaçants, les mannequins arborant un microprocesseur en guise d'estomac ne seront pas tiraillées entre envie de dévorer une portion de frites et nécessité de conserver une taille 32. Anorexie et boulimie n'auront ainsi plus cours au sein du petit monde de la mode. Enfin, tout du moins au sein de l'univers du mannequinat : le remplacement chez Conde Nast des rédactrices de mode, stylistes et autres stagiaires par des entités artificielles n'est en effet pas encore au programme…
Combien de fois la mine épuisée des mannequins a-t-elle pu susciter de profondes crises d'angoisse parmi les maquilleurs des fashion weeks ? Combien de fois les assistantes de l'agence Marilyn ont-elles dû venir tambouriner à la porte du studio de leurs jeunes recrues, afin de les extraire de leur l'état quasi comateux engendré par un rythme de travail n'ayant rien à envier aux grandes heures du stalinisme ? Combien de fois les photographes se sont-ils agacés face à une modèle piquant du nez entre deux prises ? Autant de situations qui, grâce à l'endurance illimitée des mannequins aux batteries de silicium, appartiendront bientôt à un passé que nos enfants jugeront certainement archaïque. Ou délicieusement exotique... Dépourvues d'organes sexuels, les mannequins en provenance des laboratoires japonais high-tech les plus pointus - et non plus des villages d'Europe de l'Est ou d'Amérique du Sud - mettront fin à des décennies de pratiques destructrices autorisées tacitement par l'intelligentsia fashion.
Les jeunes filles de 12/13 ans pourront désormais se promener tranquillement dans les centres commerciaux, sur les plages de Méditerranée ou dans les allées de chez Zara sans craindre de se voir apostrophées par un "chasseur de têtes" ayant vu en leur beauté juvénile un appeau à annonceurs. Il faut dire que les agences auraient tort de ne pas leur préférer des "neo-mannequins" pouvant arborer un physique "humain" extrêmement jeune, ces dernières ne risquant pas de leur attirer les foudres du ministère de la Santé...
En séparant les femmes et les mannequins en deux catégories bien distinctes (l'une étant 100% réelle et multiple et l'autre 100% artificielle), l'industrie de la mode permettrait enfin à la gent féminine de se libérer du joug imposé par la perfection de ses égéries photoshopées. Les belles des magazines ne seraient en effet plus perçues comme un mètre étalon, mais plutôt comme des héroïnes de fiction (à l'instar de personnages de BD).
Pour en savoir plus : https://www.gqmagazine.fr/en-compagnie-du-professeur-hiroshi-ishiguro
Par Lise Huret, le 18 juillet 2018
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