I. Le dress code
Plus qu'un vêtement en particulier ou qu'une couleur à adopter, l'une des premières choses à repérer est la façon dont on aborde les pièces du nouveau dressing printemps/été 2008. Ainsi, séance shopping ou non, on parviendra à être tendance en adoptant le dress code de la saison.
Longueur genoux
Les jupes, les robes, et même certains pantalons - qui se transforment en bermuda blousant - ont intégré le message : la bonne longueur cet été sera celle qui floutera le genou, ou qui s'arrêtera un peu en dessous ou un peu au-dessus. Dans un esprit classic working girl chez Yves Saint Laurent, secrétaire modèle chez Dior, jet-setteuse de luxe chez Burberry Prorsum ou robe tulipe chez Céline, la mini n'a pas de place. Les jupes se veulent crayon très rétro ou en corolle, les looks se font sages ou tout du moins tentent de l'être.
En effet, la longueur réglementaire, un brin old school, se voit souvent détournée par des transparences, des escarpins aventureux, des matières expérimentales ou des looks conceptuels voire glamours à force d'être fétichistes. C'est sans aucun doute La longueur phare de la saison à venir, qu'il faudra savoir accessoiriser afin de ne pas tomber dans le ringard ou le vieillot. Il faudra se la jouer très classe hollywoodienne, jeune écolière espiègle ou Parisienne chic.
Épaules asymétriques
C'est un classique qui revient régulièrement. Cet été, l'épaule dénudée, la coupe "toge" et le drapé asymétrique ont le vent en poupe. Chacun y va de son concept, mais l'évidence est là : il va falloir remiser au placard les tops asymétriques un peu cheap qui pouvaient encore séjourner dans notre garde-robe, car la saison a décidé de rendre cette coupe select, romantique et élégante. Lanvin la décline sur sa désormais traditionnelle petite robe de cocktail, sobre mais furieusement chic, la nudité de l'épaule mettant en valeur le volume de la coupe. De même chez Givenchy, qui travaille la manche ballon en version unique, laissant à l'air libre la moitié de la carrure. L'asymétrie est propice aux oppositions et permet de jouer sur des extravagances qui doubles auraient sûrement été too much, mais qui seules éclairent la tenue et lui confèrent ce qu'il faut de modernité. On trouve également des asymétries en superposition chez Lagerfeld ou Alberta Ferretti, qui eux ont décidé de jouer sur les transparences, ne dévoilant pas la peau mais en la suggérant, pour un effet classieux, délicat et évidemment très 2008. Le ceinturage
Cette saison, tout ou presque se voit ceinturé. On a l'impression que plus rien n'a de structure sans cette fameuse ceinture - aux formes multiples - qui enserre les tailles, gaine les gilets, vestes et robes, et parfois le tout ensemble. La ceinture est partout : se glissant dans les passants d'un pantalon masculin chez YSL, girly taille haute chez Chanel, japonisante pour DKNY, porté taille basse sur certains podiums Italiens, fine sur la plupart des robes ou des ensembles faussement sévères d'executive women, mais également double, sobre, verni, bijou, accessoire à part entière ou simple lien indiquant les nouvelles délimitations de la silhouette… la ceinture investie tous les styles. On ne discute pas sa présence, cet été c'est une évidence.
Du long
Chaque été on nous assure le retour du long, du très long, de cet esprit baba cool flottant qui devrait nous dessiner une silhouette romantique et féminine. Cependant cette tendance à un peu de mal à être adopté. On ne sait pourquoi, mais le long semble être réservé aux stations balnéaires et hésite à fouler les pavés urbains. Néanmoins pour l'été à venir les choses risquent de changer. Kate Moss a amorcé l'idée de la jupe tube dégoulinant jusqu'aux orteils, alors que dans le même temps les designers ont exécuté plus d'une variation autour de ce thème… deux points qui semblent prédire un retour au long - et surtout à un long citadin - pour la future période estivale. Que ce soit Matthew Williamson, Blumarine ou Etro qui pensent le tout version djellaba, Paul Smith qui fait de son uniforme preppy school une robe polo descendant jusqu'aux chevilles ou encore Dolce Gabbana qui misent sur l'oversize gipsy, le long se décline sous plusieurs thèmes, du plus sage au plus extravagant. L'essentiel, quel que soit le modèle choisi, est de l'assumer et de le porter en ville. On se doute que dans le métro, en velib' ou sur les trottoirs glissants des ondées de juillet, cela n'est guère facile, mais cela ne découragera sûrement pas la fashionista en quête de romance esthétique… Pantalons aux chevilles
Si les pantalons larges, sarouels et autres jodhpurs sont encore présents sur les podiums, la nouveauté de l'été est cette façon de roulotter ses bas de pantalon sur la cheville afin de dégager celle-ci. On l'a vue lors des défilés parisiens : les rédactrices de mode affectionnent particulièrement les pantalons cigarettes s'arrêtant à la naissance du mollet, ou ceux plus larges qui floutent la silhouette tout en étant également courts sur la jambe. Sont-elles visionnaires ou simplement dans les petits papiers des créateurs ? Quelle qu'en soit la raison, elles avaient tout bon. Cet été, les pantalons étroits de chez Gucci se stoppant juste au-dessus de la malléole se veulent rock and roll (associés à un micro blouson en cuir), tandis qu'Etro voit des baggy fluides dans l'esprit "je les retrousse afin de passer la rivière". Mais celle qu'il faudra sûrement suivre sur ce sujet c'est Isabel Marant, qui nous livre une collection casual army très revival Che Guevara, à base de pantalons camouflage, kaki ou gris, qui se déclinent en treillis, fuseaux ou faux jodhpurs, le tout court voire très court sur la cheville. Le dress code est loose et faussement taille basse, à force d'enfoncer les mains dans des micros poches. Une attitude post ado révolutionnaire à patiner pour un look up to date qui se démarquera un peu de la tendance rétro stricte ou baba-cool vitaminée.
II. Couleurs et imprimés
Une palette chromatique allant du jaune pâle au plus pur des citrons, des imprimés qui jouent au trompe l'oeil, des fleurs qui envahissent l'espace... ainsi va le graphisme estival 2008.
Pastels et flashy
Les pastels remportent la partie, mais les couleurs vitaminées ne s'avouent pas vaincues. Depuis les collections automne-hiver, les couleurs flashy voire fluo ont investi un univers qui auparavant se plaisait à décliner des teintes passe-partout, faciles et quelque peu ternes. La révolution a eu lieu : le turquoise, le jaune citron, le vert gazon et le rose Barbie ont fait leurs gammes au sein des gardes robe de la rentrée. Mais une telle débauche de couleurs ne pouvait rester leader plus d'une saison, les risques d'overdose auraient été trop importants. C'est pourquoi pour l'été prochain de nombreux créateurs ont choisi de délaver ces tons pepsy et de travailler les pastels.
Issa décline les teintes guimauves sur du vaporeux et du flou, alors que Marc Jacobs et Peter Jensen misent sur des puzzles de vert d'eau, jaune pâle, bleu light et mauve, le tout structuré et accessoirisé mais donnant l'impression d'avoir un besoin urgent de Mir couleur… Le pastel se porte en total look (comme le flashy de la saison dernière) mais est réservé aux jeunes femmes en fleur que rien ne peut affadir.
Les couleurs pepsy n'ont cependant pas déserté le terrain. Le jaune est celle qui résiste le mieux : elle s'associe au gris, formant une combinaison heureuse et facile à adopter, jugulant l'effet dynamisant du citron et redynamisant le gris souris. Sur certains défilés, les pastels sont oubliés, les risques de redites hivernales occultés et on assiste à une véritable explosion de couleurs. On trouve ainsi du pur rose sexy chez DSquared, du bleu électrique jet set chez Burberry, du bleu girly chez Moschino, de l'orange juice pour DKNY ou encore du coquelicot chez Céline… Le feu d'artifice néanmoins se démocratise : le total look n'est plus une condition sine qua non au pepsy. On peut le porter par touches, avec une couleur sombre, en accessoire ou mixé à d'autres couleurs.
Nature morte et liberty
S'il n'y avait qu'une tendance à retenir, ce serait sûrement celle-ci : la floraison précoce de fleurs diverses sur les podiums des collections printemps-été 2008. Quoiqu'en dise Karl Lagerfeld, on espère que les imprimés floraux ne seront pas réservés aux personnes en surpoids, car on risque bien de succomber à l'envie de se parer de graphismes printaniers dès les beaux jours venus. Dans ce champ de fleurs fashion, on distingue deux écoles : celle de la nature morte, aux orchidées et pétunias un brin tapisserie, et celle du foisonnement de multiples fleurettes, dans un esprit liberty.
Marc Jacobs, Balenciaga, ou Dries Van Noten misent sur le all over imposant, sur les teintes vives et chatoyantes. L'un se sert de cet imprimé pour imager le look de la parfaite ménagère Américaine et lui fait subir un savant traitement destroy, tandis que l'autre en pare des cocons minimalistes afin de leur conférer une note faussement classique, alors que le dernier joue les associations, les métissages, afin de dessiner une silhouette bohème classieuse.
Autant la première tendance pose son parfum capitonneux sur des matières parfois rigides, souvent satinées et aux tombés lourds, autant le liberty est le corollaire de la fluidité, de la mousseline, de la légèreté et de la fraîcheur. Balmain le pense pâle, rosé, sur de longues toilettes vaporeuses, très peace and fashion. Luella lui offre ses lettres rock and roll en le teignant, en le travaillant en micro volants ou sur des mini robes punkettes. Pour Dolce & Gabbana, ce sont les patchworks de liberty sur des longueurs oversize qui les inspirent, donnant naissance à des robes romantiques décomplexées. Junya Watanabe quant à lui traite la tendance en savants drapés et coupes typiques "créateurs japonais", qui donnent une nouvelle jeunesse à cet imprimé qui parfois pourrait se galvauder.
Libre aux fashionistas aventureuses de tenter le dress code Ghesquière, nous on se contentera des spartiates tressées de son défilé… On préférera adopter le liberty à la Watanabe ou à la Balmain, plus light mais tout aussi tendance, pour se créer un look frais, à mi-chemin entre Laura Ingalls et une Tokyoïte déjantée.
Expression picturale
Cette saison, les vêtements ont été traités comme des toiles vierges, comme si chacun avait eu envie de travaux manuels, de jouer avec les pigments et d'apposer aux collections quelque chose d'à peine contrôlé, de laisser vivre les couleurs et de changer son statut de styliste pour celui d'artiste.
Plusieurs courants artistiques ont ainsi inspiré les designers, de l'action painting pour Dolce & Gabbana, qui projettent sur leurs créations de véritables jets de peintures, à Giles Deacon et Zac Posen, qui réinterprètent le tie and dye, infusent les teintes, génèrent des dégradés spontanés et en habillent tenues de soirée, tailleurs sérieux ou robes sages. Quant à Miuccia Prada, elle mixe graphisme art déco et manga sur des toilettes de soie, et signe ainsi l'une de ses plus jolies collections.
Le tie and dye sera sûrement le plus repris par la grande distribution… Afin de ne pas tomber dans un revival hippie de mauvais goût, il est conseillé d'opter pour des tenues chics et élégantes, qui feront oublier le passé Woodstock de ce type de teintures.
Effet d'optique
Pour l'été, les opposés se côtoient : le pastel et le vif, l'extra long et les pantalons courts sur la cheville… Il en va de même pour les imprimés : le tie and dye floute les frontières et mélange les couleurs, alors qu'une autre tendance plutôt contradictoire émerge à ses côtés : les graphismes "effet d'optiques" prennent le contre-pied des dégradés doucereux et tranchent.
C'est ainsi que chez Givenchy apparaissent de larges pois, faisant le jeu des déconstructions et du néo-gothique couture de Ricardo Tisci. Quant aux rayures, elles vont dans tous les sens : on les découvre verticales, horizontales ou en biais (sur les tailleurs punks d'Anna Sui), elles se font esthétiquement correctes pour DKNY, typiquement jeune fille de l'upper side. Elles ne sont pas en reste chez Fendi, Jean Paul Gaultier et Marc Jacobs et se travaillent à la Beetlejuice chez Rick Owens et Dior. On peut officiellement dire qu'elles seront bien présentes l'été prochain.
Pour les plus sages d'entre nous, les silhouettes DKNY peuvent être copié/collé, alors que pour celles que la fantaisie tentent, haro sur les looks Anna Sui !
III. Matières et coupes
Entre vestales printanières et silhouettes des années 40, les transparences cotoient les coupes plus structurées, tandis que la légereté des voiles adoucie certaines lignes rigides voire sévères...
Transparence et superpositions de voiles
Un esprit lingerie sévit sur les catwalks : les transparences se font fréquentes, les voiles dépassent des jupes, les dentelles ornent des combinaisons qui sortent de jours, les tulles et mousselines se font impudiques…
John Galliano, que ce soit sur son défilé ou pour Dior, décide de dévoiler à force de fanfreluches translucides les silhouettes graciles de pin-up d'un autre temps. Finesse, richesses des détails, si la transparence telle qu'elle est présentée sur les défilés est séduisante, mais peu facile à porter, en tout cas elle donne le ton. Cet été, on jouera avec des pièces lingeries si jolies et délicates qu'elles se superposeront entre elles, se napperont d'un gilet, se pareront de spartiates montantes et feront les beaux jours du printemps.
Mais au-delà du thème sous-vêtements, l'une des grandes tendances de la saison à venir est à la légèreté et aux voiles de mousseline diaphanes qui se superposent, afin de nuancer, d'opacifier par endroits la silhouette pour rendre les tenues follement féminines, délicieusement fragiles mais néanmoins décentes. Le jeu est de dévoiler sans dévoiler, de cacher sans cacher, de suggérer.
Christopher Kane le fait à merveille avec ses longues baby doll volantées, majestueuses et ajourées, à la fois naïves, séductrices et rock and roll. Karl Lagerfeld quant à lui traite les transparences en les superposant et en coupant la maille à cru, afin d'obtenir des flous nets et modernes. Alexander McQueen plie, plisse, drape la mousseline, qui à force d'être multipliée en devient opaque (mais toujours vaporeuse), afin de dessiner une vestale guerrière divinement actuelle. Et enfin Marc Jacobs pour Vuitton poétise sur le thème et en livre une version sucrée finement destroy, absolument coquette.
On retiendra au final : légèreté, volant et superposition, plissés, accumulations de matières arachnéennes, féminité jamais aguicheuse, suggérer plutôt que dévoiler…
Les coupes coutures
L'été sera également marqué par des coupes coutures qui corsètent et disciplinent le corps, plutôt que de le laisser aller à une nonchalance fluide et souple. Les hanches sont marquées par des basques volumineuses, structurées et rigides, voire préformées. Les tailles s'étranglent à grand renfort de ceintures, mais surtout de découpes gainantes ou de fins corsetages. Les carrures s'accentuent à coup d'épaulettes, de manches ballons futuristes, ou d'épaules à la Mugler.
Ces silhouettes, qu'elles soient néo-coloniales chez Proenza Schouler, jeunes filles fatales pour McQueen, expérimentales avec Balenciaga ou classiques rigoristes chez YSL, imposent maintient et élégance. Elles confèrent à celles qui les portent un charme froid, sévère, baigné toutefois d'un petit détail qui fait la différence et qui réchauffe l'ensemble : boutonnage suggestif, croco laqué, micro longueur ou touche sportswear.
On notera également que les plumes et les franges en tout genre risquent de faire parler d'elles, qu'encore une fois les souliers de la saison vont nous séduire bien au-delà du raisonnable, que les défilés Etro et Isabel Marant offrent un bon nombre de look trendy et désirables, que les boomers Miu Miu sont absolument divins et que Ricardo Tisci est un génie visionnaire…
©photo : Vogue
Par Lise Huret, le 17 octobre 2007
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