Défilé Céline - Printemps/été 2023
En présentant sa collection printemps/été 2023 bien après ses petits camarades, Hedi Slimane offre à celle-ci une visibilité toute particulière. Un coup de projecteur qui met notamment en lumière la paresse stylistique assumée et décomplexée du DA de chez Céline...
Le lieu
Céline quitte Paris pour rejoindre les mythiques et très prisés Saint-Tropez et Ramatuelle. Tour à tour filmées défilant sur une jetée déserte, minaudant à bord d'un voilier ou posant sur la plage de la villa d'Hedi Slimane, les mannequins évoluent dans une atmosphère de happy few biberonnés aux jus détox, shoots de vodka et autres récréations poudrées.
La bande-son
"Music When The Lights Go Out" : un titre du groupe The Libertines sorti en 2004 faisant parfaitement écho à l'esthétique "indie rock" du show.
Une ode aux années 2000
Et plus particulièrement à la collection Dior Homme printemps/été 2006. Imprégnée de l'imagerie "Pete Doherty", cette dernière semble avoir servi de point de départ à un vestiaire reformaté pour coller à la fille Céline de 2023.
Le retour du slim
Après avoir fait dire à Karl Lagerfeld : "Ma seule ambition dans la vie ? Porter des jeans taille 28", les slims imaginés en 2000 par Hedi Slimane pour Dior refont aujourd'hui surface sur les rivages de la Méditerranée. Skinny (à la limite du legging), ceux-ci servent une dégaine rock décharnée que l'on pensait appartenir au passé.
Oui mais voilà, comme le rappelle la note d'intention accompagnant le show Céline, la mode fonctionne par cycles. Après avoir usé jusqu'à la trame le concept du pantalon/jean large, cette dernière boucle ainsi naturellement la boucle en célébrant à nouveau son opposé.
Le retour de l'extrême minceur
Si elle fut toujours présente au sein des castings visant à servir la vision artistique d'Hedi Slimane, l'extrême minceur joue ici plus que jamais le role de colonne vertébrale du vestiaire Céline. Impossible en effet d'obtenir l'effet stylistique généré par les mannequins lorsque l'on affiche une taille 38/40. Autrement dit, si l'on excepte les adolescentes à la morphologie filiforme, la clientèle asiatique et les femmes en ayant fini avec la nourriture, peu d'individus pourront s'approprier les silhouettes Céline. Or, le style Céline étant hautement prescripteur, il y a de fortes chances que cette collection déclenche un syndrome Kim Kardashian chez bon nombre de consommatrices…
Des retours en cascade
Quand Hedi Slimane évoque une décennie (ou un style), il convoque sans aucun état d'âme toutes les pièces fortes ayant servi cette dernière, au risque de paraître légèrement premier degré. C'est ainsi qu'en choisissant cette saison de se référer aux années 2000, il exhume sans surprise les fameuses bottes biker de l'époque (dont la largeur accentue l'effet "brindille" du skinny), les tops et robes en crochet rappelant l'âge d'or de Coachella, la veste officier esprit Pete Doherty, le glitter grunge à la Kate Moss, la veste militaire oversize ou encore le porté du sac à main au creux de la saignée du coude…
Des mix toujours gagnants
Le stylisme reste le point fort d'Hedi Slimane, qui parvient à générer une dégaine désirable à partir de vêtements vus et revus.
On pourra ainsi :
Marier un blazer un brin long à revers smoking avec un bas extrêmement moulant, le tout finalisé par une paire de boots de biker et sophistiqué par un sac à main de facture classique (voir ici).
Réchauffer une robe en crochet un brin loose au creux d'un perfecto en cuir noir (voir ici).
Faire du veston en cuir légèrement trop grand le compagnon des marinières et autres longues chemises à rayures verticales (voir ici et là).
Dénicher une veste Adidas trop petite veste à porter sur une mini robe en crochet (voir ici).
Réchauffer un short taille basse muni d'un large ceinturon par le biais d'un ample et long gilet (voir ici).
Mais aussi faire la part belle au trio veste type Chanel/chemise en jean/jean taille basse, à l'idée du glitter décliné sur des pièces boyish ou minimaliste-girly, au duo veste officier/robette à sequins ou encore aux coudières contrastées…
Le verdict
La grammaire d'Hedi Slimane - qu'il décline depuis de nombreuses années entre basiques upgradés et ligne androgyne - apparaît curieusement aussi datée qu'intemporelle. Ses silhouettes n'ont rien de novateur, rien de génial, et pourtant elles distillent encore et toujours une certaine désirabilité. C'est cela la magie Slimane : rendre la normalité inatteignable, le basique infiniment luxueux, l'esthétique Zara bankable…
Voir le show : https://www.celine.com/show-saint-tropez
Par Lise Huret, le 21 novembre 2022
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