
Dans ce contexte, le groupe Condé Nast s'est empressé "d'éduquer" le peuple indien en lançant chez eux la 17e édition de Vogue. Depuis quelques mois, les Indiens ont ainsi la possibilité de découvrir les fastes de la société occidentale. Les magnats du secteur ont d'ailleurs tous répondu présents : Gucci, Fendi, Burberry, Hermès… pas un ne veut manquer l'opportunité d'accompagner la croissance indienne.
Cependant, on sait très bien que si le pays voit effectivement certains de ses ressortissants accéder à l'univers du luxe, la majorité d'entre eux vit avec moins d'1 dollar par jour, et est confrontée à une misère immense. C'est pourquoi un minimum de décence est nécessaire si l'on ne veut pas devenir complètement inhumain, gangrené par l'appât du gain. C'est ce "minimum" qui a malheureusement fait défaut à l'une des séries mode de la parution du mois d'août.
En effet, 16 pages - consacrées à la mise en valeur de sacs, parapluies et autres accessoires - furent shootées non pas dans un studio avec tel ou tel mannequins ou stars de Bollywood, mais dans la rue avec pour figurants des Indiens plus préoccupés par la survie au quotidien que par les dernières tendances.

Dans un pays ou l'on se suicide parfois pour échapper à une pauvreté écrasante, les médias luxe ne peuvent se permettre des inepties de ce genre. Pour sa défense, Vogue assure avoir voulu illustrer "la nouvelle Inde", où il est possible de réaliser une ascension sociale fulgurante et d'en afficher les signes. Qu'à cela ne tienne, lorsqu'on réalise que les légendes des photos ne font pas référence aux mannequins d'un jour mais simplement aux marques de sacs, on réalise à quel point Vogue n'a que faire du facteur humain…
Alors certes, il est évident que l'industrie du luxe va déferler en Inde et que seuls quelques élus y auront accès, et cela en soi n'est pas critiquable. Ce qui l'est plus, c'est de mélanger les genres de façon unilatérale. Que les sacs Hermès restent donc dans les boutiques de Mubai, et que les photographes se contentent de Gisele, on évitera peut-être ainsi des images malheureuses…
Par Lise Huret, le 03 septembre 2008
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