Vogue UK et Linda Evangelista : le rendez-vous manqué
Les couvertures du Vogue de septembre ont pour coutume de faire l'événement. Celle de l'édition britannique de cette année ne fait pas exception à la règle : c'est en effet la mythique Linda Evangelista - que l'on disait défigurée - qui prend pose la pose sous l'objectif de Steven Meisel…
Les faits
Linda Evangelista apparaît en couverture du Vogue UK du mois de septembre. Un véritable événement au sein du microcosme fashion, sachant que l'ex-top modèle s'était retirée de la sphère publique suite à son hyperplasie (un effet secondaire provoqué par ses séances de coolsculpting), jugeant être désormais défigurée.
La couverture
Points de traits déformés ou d'ovale modifié : le visage que nous montre ici Linda Evangelista fait écho à celui qui fit son succès dans les années 90. Sa peau n'a jamais semblée aussi lisse, ses pommettes si dessinées. Mais où est donc passée la femme qui publiait sur son compte Instagram la couverture du magazine People où elle ne cherchait pas à cacher son visage moins ferme ?
Un politiquement incorrect trop correct
En faisant poser en couverture de son magazine une top modèle dont on dit la beauté altérée, Edward Enninful (rédacteur en chef du British Vogue) s'émancipe sur le papier des normes qu'imposent les canons de beauté sévissant encore dans le monde de la mode. Malheureusement, son choix "audacieux" se voit contredit par le traitement apposé à la mannequin en question. Car ici point de mise en valeur de la femme qu'est aujourd'hui Linda Evangelista : que ce soit sur les photos de Steven Meisel (voir ici et là) ou au sein du texte préfaçant l'édition de septembre, celle-ci est uniquement renvoyée à sa gloire passée. En choisissant de faire renaître grâce à moult artifices - scotchs maintenant la peau, élastiques tirant cette dernière, foulard redessinant l'ovale… - la Linda Evangelista ayant bercé ses rêves d'adolescent, Edward Enninful perd une occasion sublime de célébrer l'individu en tant que tel et non uniquement son image. S'il avait choisi de montrer la mannequin canadienne telle qu'elle est aujourd'hui - à savoir une femme de 57 ans perturbée à l'idée de voir sa beauté se faner - (voir ici et là), la portée des images aurait assurément été toute autre.
La photographier sans chercher à gommer son vécu aurait signifié que l'on peut être inspirante même lorsque la jeunesse et la beauté s'estompent, même lorsque nos choix nous abîment. Mais aussi que la personnalité, l'aura et l'éclat peuvent prendre le relais quand la perfection physique s'efface.
Cela aurait également permis d'ouvrir la réflexion sur l'envers de cette fameuse médecine esthétique dont on parle si souvent au sein des pages de Vogue et notamment sur ses "effets miracles" qui mériteraient de se voir tempérés.
Ce que j'en pense
J'aurais aimé découvrir au sein des pages de Vogue une Linda Evangelista posant avec vitalité, s'appropriant son corps, faisant un avec celle qu'elle est aujourd'hui, plutôt qu'un visage dont on ne laisse apparaître que le centre temporairement "sur-lifté". Les photographies du Vogue UK me glacent. Je n'y trouve rien qui me galvanise, qui me donne envie d'avancer, qui me procure de l'espoir. Ce sont des images mortes. J'y vois une fausse prise de risque, une illusion qui ne sert que Vogue…
Par Lise Huret, le 22 août 2022
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Ce n'est pas du voyeurisme que de souhaiter voir cette magnifique femme telle qu'elle est aujourd'hui, avec son histoire, y compris ses mésaventures de médecine esthétique (qui ont l'air vraiment horribles). C'est d'autant plus étonnant qu'elle semble mener un vrai combat contre la désinformation dans la chirurgie esthétique. C'était donc l'occasion parfaite de faire passer le message.
En tout cas ce rendez-vous manqué, comme tu l'appelles, me rend triste : je me dis qu'elle doit terriblement souffrir pour ne pas assumer ses changements physiques au point de se coller du scotch sur la figure. C'était peut-être un peu trop pour elle, on peut le comprendre aussi...